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20 – De Lima à Paris

20 - Retour à Paris

20 – Retour à Paris

Eh bien nous voilà de retour à Paris, sains et saufs après notre grande évasion de six mois et 20.000 km à motos. Enfants et petits enfants nous ont fait la fête ; ils ont mûri et grandi pendant trop longtemps sans nous ! Nous sommes en bonne santé, et nos motos, en tout aussi bonne santé, ont fini par nous rejoindre à Paris, également par avion. Cela paraît simple ? Cette fin de voyage aura pourtant été la plus laborieuse de tout notre parcours !

Lima, d’abord, est de loin la ville la moins sympathique que nous ayons visitée… Métropole de 9 millions d’habitants, la « ville des Rois » n’a pas gardé beaucoup de traces, et encore moins de charme, de son glorieux passé de capitale de la Vice Royauté du Pérou. Pizarro l’avait choisie pour sa proximité – toute relative ! – avec l’Espagne, loin des Cordillères et de l’Altiplano, là où vous pouviez sauter dans un galion pour l’Espagne, ou en recevoir les nouvelles ‘fraîches’. Mais le climat de ce bord de mer est malsain ; l’océan Pacifique y est glacial et, comme à Valparaiso, la ville n’est pas tournée vers la mer. De plus, c’est encore le désert littoral : il ne pleut jamais à Lima (moins de 2cm par an), ce qui fait que la ville – longtemps la capitale du guano – jamais nettoyée par la pluie, est sale, et en permanence recouverte d’un « smog » provoqué par la différence de température entre l’océan et le désert.

Et c’est dans cette ville que nous sommes restés bloqués 12 jours, découvrant les arcanes mystérieux des procédures d’exportation, apparemment durcies par la DEA (l’administration américaine qui lutte contre le trafic de drogue) omniprésente ici ; le Président Evo Morales, l’avait expulsée de Bolivie en 2011 ; au Pérou, après quatre jours de procédures pour mettre nos motos dans un container maritime, il apparut que nous ne pourrions pas les y conduire nous-mêmes, d’où des frais (d’emballage, de manutention…) tels que la solution avion redevenait compétitive. Mais il apparut qu’elle exigeait que nous produisions notre billet d’avion avant de pouvoir commencer les formalités douanières… Confiants dans notre transitaire, et épuisés par dix jours de démarches, nous avons enfreint la règle que nous nous étions fixés de ne pas abandonner nos motos sans leur titre de transport. Et çà n’a pas loupé ; dès notre arrivée à Paris, la douane péruvienne nous cherchait des poux sur le contenu de nos déclarations à l’entrée au Pérou, trois semaines plus tôt, à la frontière bolivienne. Pas à pas, sans nous énerver, nous avons pu gérer le problème à distance… et trois semaines après notre retour, nous étions invités à aller chercher nos motos à Roissy, où la douane française sait aussi bien qu’au Pérou mettre nos nerfs à l’épreuve en exigeant que nous coupions les cheveux en quatre… Plus de précisions sur Lima comme sur le transport de nos motos et leur coût dans l’album de photos joint !

Un mois tout juste que nous sommes revenus à Paris… que l’atterrissage est long et difficile ! Nous sommes moulus dans nos corps et dans nos têtes ! Nous avons vraiment vécu que le mot anglais ‘travel’ est de la même racine que le mot français ‘travail’ ! Et ce n’est qu’au retour que nous prenons conscience que partir six mois sur la route, c’est vraiment ‘décoller’ du quotidien : on s’en affranchit en effet comme on ‘décolle’ en avion ; dès que notre cargo a largué ses amarres du port du Havre pour prendre la direction du Golfe de Gascogne et de l’Afrique, et que nous prenons possession de notre cabine pour trois ou quatre semaines, nous nous trouvons face à un immense ‘espace-temps’, devant nous. Et tout ce et ceux que nous laissons derrière nous s’éloignent dans un autre monde, toujours aussi réel et vivant certes, mais de la même nature que les banlieues, embouteillages et villes que nous voyons diminuer rapidement alors que l’avion prend de la hauteur à travers les nuages, pour nous retrouver dans un ciel infini et immaculé.

Pendant une durée de six mois, c’est le calme, le recul, et l’éloignement des soucis terrestres ; les nuages, miasmes, et activités de tous ceux qu’on aime nous deviennent quelque part ‘terre à terre’, restent collés au sol, et on regarde vers les cieux, vers d’autres cieux et de nouveaux horizons. Notre vie n’en reste pas moins difficile, pleine de stress, d’inconnu, de ‘travail’ et d’obstacles à surmonter ; un peu comme Jonathan, vous connaissez ? Livingston, le Goéland… Il y a les goélands qui volent derrière les chalutiers et s’assemblent sur les plages, et ceux qui, jours et nuits, s’esquintent à voler… seulement pour voler, toujours plus haut et plus loin !

Au retour dans notre petit appartement parisien, il nous faut donc réapprendre à vivre ‘normalement’, et là aussi, c’est laborieux ! Il y a une pile de courrier, il faut remplir plein de ‘déclarations’ qui nous relancent sous peine de ‘perte de droits’, retrouver des relevés, des chiffres, des tableaux, des mots de passe, des adresses ; il faut changer les cartouches d’encre de l’imprimante, payer des factures, acheter des enveloppes, des timbres ; participer avec nos voisins à la décision de changer ou pas le système d’interphone… Il y a aussi les faire part : de naissance, de mariage, de décès ; le monde a vécu intensément sans nous ! Et nous reprenons contact peu à peu avec la réalité.

Il nous faut nous réinsérer dans des rythmes, des habitudes : le café du lundi, la piscine du mercredi, le brunch familial du week end, un abonnement théâtre, mille activités qui doivent remplir un agenda … Faute de nous déplacer dans l’espace, c’est le temps qu’il convient maintenant de rythmer par des balises… Et puis, de déjeuners de copines en dîners d’amis, d’une expo ici à une conférence là, cette vie bien remplie de sédentaire citadin ‑ à construire avec mille tentations d’autant plus exigeantes que nous en avons été privé longtemps ‑ apparaît paradoxalement beaucoup plus éclatée ou dispersée qu’un avenir inscrit sur une carte à découvrir en vrai. « ‘Ailleurs’ est un mot plus beau que ‘demain’ » disait Paul Morand.

Heureusement, nous avons des souvenirs plein la tête, et une multitude de nouveaux amis. Et puis, il reste du boulot avant de classer notre aventure : d’abord réparer le blog, brutalement saboté il y a six mois par WordPress (çà y est, c’est fait, vous pouvez accéder à tous nos voyages précédents de manière inégalée !), préparer les albums papier, remercier les cousins argentins pour leur accueil et tous ceux qui nous ont soutenus pendant notre aventure, reprendre contact avec tous ceux qu’on a croisés sur la route et… préparer les voyages suivants !

Nous espérons à bientôt pour un nouveau périple !

19 – Le Pérou, du Titicaca à Lima

19 - Le Pérou, du Titicaca à Lima

19 – Le Pérou, du Titicaca à Lima

 

Le Pérou est un grand pays (30 M d’habitants, 1,3 M km², plus de deux fois la France) s’étendant à cheval sur les Andes culminant à près de 7.000 m, s’étendant sur plus de 2.000 km du nord au sud, et 1.000 km d’est en ouest, de la forêt amazonienne jusqu’aux déserts longeant la côte de l’Océan Pacifique. Nous y sommes entrés par le sud-est, en suivant les rives du lac Titicaca (3.800 m), et avons parcouru d’abord tout l’Altiplano péruvien jusqu’à Cuzco (500.000 hab), l’ancienne capitale inca, dont son conquérant espagnol, Pizarro, rapportera à son roi Charles 1er, juste après la conquête de la ville en 1533 : , « C’est une ville si belle, qui possède de si élégants édifices qu’elle serait remarquable en Espagne même » ; cela ne l’empêcha pas de la piller et surtout de la détruire ; seul son plan en damier (hippodamien !) et ses fondations ont survécus. Le seul problème du lac Titicaca et de Cuzco, c’est l’altitude ; car, honnêtement, nous ne nous serons jamais vraiment habitués à séjourner si longtemps si haut ! Et pourtant, nous aurons passé un bon mois sur l’Altiplano, avec plusieurs pointes jusqu’à 5.000 m… les motos, elles, se sont montrées à peine un peu poussives, en tous cas beaucoup moins que nous, avec nos mâchouillements de feuilles de coca !

Nous avons pu malgré tout sillonner pendant huit jours la région de Cuzco à pied, en taxi, en car, en train ou à moto ; les paysages et les gens y sont très beaux et accueillants, et on comprend que les conquistadors s’y soient sentis chez eux. Il y a de nombreux musées où s’exposent les pièces récoltées sur les sites incas, et nous revenons pleins d’admiration pour cette civilisation. Elle ne connaissait certes ni la roue ni l’écriture, remplacées par les lamas et le « quipu » (voir album) ; elle a pourtant réussi à dominer intelligemment une multitude de peuples par un système de réciprocité très moderne : vous payez des impôts parce que l’Inca vous construit des routes, des terrasses, des systèmes d’irrigation, et vous indique aussi quand le Ciel veut que vous semiez et récoltiez. Le clou de notre visite chez les Incas fut la découverte, magique, de leur cité sacrée, le Machu Picchu, au lever du soleil, en compagnie, comme vous le verrez, d’un alpaga très photogénique.

En dehors des trésors d’architecture espagnole coloniale, c’était aussi l’occasion de découvrir que les Incas n’étaient jamais que la dernière en date des civilisations ‘précolombiennes’ (= datant d’avant Christophe Colomb), celle qu’avaient liquidée les conquistadors. Mais les Incas n’avaient « d’empire » que depuis moins de deux siècles ; autour d’eux, et avant eux, depuis plus de 4.000 ans, d’autres civilisations s’étaient épanouies sur les mêmes lieux ; nous avons évoqué celle du Tiwanaku en Bolivie ; nous avons découvert dans les musées péruviens d’extraordinaires pièces provenant des Salinar, des Chimù, des Chancay, ou des Mochica. Et nous avons découvert sur place les Nazca, qui ont prospéré entre l’an 1 et l’an 800, en y laissant notamment d’innombrables, gigantesques et mystérieuses « lignes » à la surface du désert côtier. Du lac Titicaca à Cuzco, puis en descendant vers la côte Pacifique, il nous a fallu franchir une demie douzaine de cols à plus de 4.000 m séparés par de profondes vallées nous faisant redescendre chaque fois à moins de 2.000 m : un régal pour des motards, sur des routes presque excellentes partout. Nous arrivions en plus à la fin de l’été et de la saison des pluies, et, contrairement à ce que je craignais, malgré l’altitude, nous n’avons pas eu du tout à souffrir du froid.

Nous sommes maintenant arrivés à Lima, la capitale fondée par Pizarro lui-même au XVIème siècle. Depuis Buenos Aires et Cordoba, en passant par Potosi, La Paz et Cuzco, nous avons parcouru l’intégralité de la route royale espagnole par laquelle tout le commerce et toute l’information ont circulé en exclusivité pendant plus de deux siècles. Les Vice Rois du Pérou résidaient à Lima, d’où partaient les galions vers l’isthme de Panama, puis Carthagène et Saint Domingue, où se rassemblait chaque année l’Invincible Armada pour sa traversée annuelle vers Séville. Nous avions l’intention de remonter encore un peu plus au nord, jusqu’en Equateur, mais avons décidé finalement qu’un rassemblement de 9 petits enfants (sur 11) à Montbives pour l’Ascension justifiait notre retour anticipé. Nous n’avons pas prévu de revenir en passant par l’isthme de Panama – que nous réservons pour un voyage ultérieur ! – et reviendrons tout bonnement en avion, après nous être assurés que nos motos nous rejoindraient un jour à Paris. Cela fait huit jours que nous travaillons la question et que nous perdons un peu patience dans cette grande ville sale de plus de 9 millions d’habitants. Nous espérons que notre prochain chapitre se terminera en vous annonçant où et quand nous reviendrons à motos du Havre, notre point de départ d’il y a six mois !

En attendant, découvrez sur l’album ci-joint le Pérou qui nous a séduits !

Cliquez d’abord sur la légende de la petite photo en tête de l’article. Puis sur ‘ICI’, et enfin sur ‘Diaporama’. Bonne lecture !

Ou bien cliquez sur : “Album Pérou du Titicaca à Lima

18 – La Bolivie des Hauts Plateaux

18 - La Bolivie des Hauts Plateaux

18 – La Bolivie des Hauts Plateaux

Nous aurons passé près de trois semaines en Bolivie, et il nous semble pourtant ne l’avoir qu’entr’aperçue. Le pays ne compte pourtant qu’à peine 10 millions d’habitants, mais sa superficie est le double de celle de la France, et nous avons dû faire l’impasse complète non seulement sur toute la partie amazonienne, qui n’était pas du tout sur notre route, mais également sur le lac Titicaca, Copacabana et l’île du Soleil, qui, quant à eux, étaient bien sûr à notre programme. Les fameux ‘bloqueos’ en effet, que nous attendions plutôt du côté d’Oruro, étaient installés depuis deux semaines sur la route de La Paz au lac, puis entre Copacabana et la frontière péruvienne, histoire d’être sûrs qu’aucun touriste ne pouvait venir. Il faut dire que le motif était grave : la traversée d’un bras du lac pour atteindre Copacabana se fait actuellement sur de charmantes barges en bois ; le développement touristique exige un pont ; les piroguiers actuels n’en veulent pas, et les gens de Copacabana en veulent trois ! Les quatre grandes villes que nous avons visitées, Potosi, Sucre, Oruro et La Paz, valaient heureusement toutes le voyage, sans parler de l’incroyable site pré-inca de Tihuanaco.

Il faut avouer que nous avions une sympathie a priori assez forte pour la Bolivie du fait que nous habitons depuis cinq ans en France une avenue Simon Bolivar, El Libertador, celui qui conquit l’indépendance du pays contre le Royaume d’Espagne en 1825 et lui donna son nom ! Quelques mois plus tard, il cédait la Présidence qu’on lui avait offerte à son Général préféré, le Général Sucre, qui donnera son nom à la capitale du pays. L’autre côté très attachant de la Bolivie est que plus de la moitié de la population est purement amérindienne, et que depuis 2006, la présidence de Evo Morales a fortement incité la population à ‘rester indienne’, notamment en portant le costume traditionnel ; un vrai régal pour nos yeux, comme vous allez le voir !

Notre première étape fut l’extraordinaire ville de Potosi, située à plus de 4.000 m, au pied d’un ‘Cerro Rico’, la ‘montagne d’argent’ qui fit la fortune de l’Espagne – et de l’Europe – pendant trois siècles. L’abondance d’argent et de main d’œuvre – la ville compta plus de 150.000 habitants au XVIIIème s. – emplit cette ville, malgré l’altitude, de monastères, églises, hôtels particuliers et palais dès le XVIème siècle, mariant en un style inimitable les traditions catholiques les plus pures avec l’art mudéjar (d’origine musulmane) des architectes venus d’Espagne et l’imagination fertile des artisans amérindiens intégrant leur mythologie dans les œuvres qui leur étaient confiées. Je ne m’étendrai pas sur l’exploitation actuelle du Cerro Rico par des ouvriers boliviens regroupés en coopératives ; leurs effroyables conditions de travail sont très bien décrites dans un article récent dont je donne le lien http dans la légende d’une des photos.

Aller de Potosi à Sucre est un vrai régal… non seulement l’excellent route est sinueuse à souhait, mais elle traverse des paysages grandioses… et elle descend… elle descend jusqu’à 2.750 m ; la température y est chaude (nous sommes en zone tropicale), on y retrouve des traces d’humidité, on y hume des odeurs oubliées depuis l’Argentine, bref, on allait s’y sentir bien ! Et effectivement, Sucre a tout pour plaire : si elle a gardé le titre de capitale officielle de la Bolivie – mais sans le siège du gouvernement qui est à La Paz – elle est surtout une ville étudiante, pleine de vie et de jeunesse. Et elle a su garder un charme colonial fou, avec ses maisons d’un ou deux étages seulement, toutes badigeonnées de blanc, mettant en valeur d’admirables balcons en fer forgé ou bois recouverts de tuiles…

C’est tout le contraire qui nous attendait à Oruro, LA ville minière par excellence, adossée à une montagne de minerais couverte de puits de mines, et où Evo Morales a fait ses études secondaires ; depuis la crise financière de 2008 et la chute des cours de minerais, les coopératives ont dû diviser par cinq les salaires des mineurs… vous comprenez pourquoi nous attendions les ‘bloqueos’ plutôt ici qu’à Copacabana ! La ville est à 85% amérindienne, et ni les costumes traditionnels ni les magasins ou restaurants ne sont ici pour séduire les touristes…. nous nous sentions vraiment dans une Bolivie ‘vraie’, et dans notre élément. Nous avons eu en plus la chance d’y avoir choisi, un samedi soir, un hôtel dominant une place où se tenait une ‘Diablada’, sorte de carnaval rassemblant des centaines de personnes aux costumes plus extravagants les uns que les autres. Bref, contrairement à beaucoup d’autres voyageurs, Oruro, simple ville étape sur la route de La Paz, nous a séduits.

Je vous passe la description de La Paz, la capitale de 2,5 millions d’habitants, tout comme celle des ruines de Tihuanaco. Tout ce qu’il faut en retenir d’intéressant, qui n’est pas dans l’album ci-joint, c’est notre hallucinante arrivée à motos… plusieurs globebikers nous avaient vivement déconseillés d’aller à La Paz à cause de son trafic dément dans un relief impossible ; mais Véronique, vous le savez, adore les centre-ville, et La Paz étant la plus grande ville de Bolivie sur notre route, on allait y arriver un dimanche sans trafic, s’y poser quatre jours, nous allions bien nous débrouiller, on en avait vu d’autres ailleurs, etc… J’avais donc préparé l’itinéraire avec soin sur Google Map, Google Earth, le GPS et les cartes et plans ; mais c’était un peu comme si j’avais préparé une traversée de la Manche à la nage avec ces mêmes instruments. En effet, dès le premier coin de rue, elle n’était pas dans le bon sens ; au second virage, le GPS disait de tourner dans la rue à droite, là, maintenant, mais il n’y avait qu’un escalier plongeant dans le vide… c’est alors que l’orage menaçant ouvrit ses vannes de grêle, là, alors que la rue plongeait à pic dans ses premiers lacets aux dalles de ciment disjointes rapidement recouvertes d’un épais liquide marron. Relever un peu sa visière pour chasser la buée fait crépiter la grêle sur la figure, puis balayer le plastique qui protège le GPS en train de recalculer l’itinéraire, éviter ce bouillonnement qui semble indiquer une bouche d’égout ouverte, piler pour laisser passer ce ‘collectivo’ dont les freins semblent rendre l’âme, poser les pieds dans le courant de 5cm de boue, doubler cet autre ‘collectivo’ qui charge et décharge des clients courant sous la pluie battante… Heureusement, le GPS, notre seul lien avec le réel, nous resta fidèle et finit par nous amener devant notre hôtel, trempés mais sains et saufs. La sortie de La Paz fut presqu’aussi dantesque ; ce n’était pas un dimanche, le soleil tapait fort, et les montées à pic sont sans doute plus difficiles dans les embouteillages que les descentes sous la pluie ! Mais Véronique s’en est là encore tirée comme une pro ! Il ne nous restait plus dans la journée qu’à visiter Tihuanaco en tenue de motard, passer les frontières pour sortir de Bolivie et entrer au Pérou, et enfin arriver à Puno à la nuit tombée.

A bientôt au Pérou !

 

Je vous rappelle qu’en ouvrant l’album Picasa joint en cliquant sur la légende de la photo en tête d’article, c’est parfois Google+ qui s’ouvre au lieu de Picasa Web, lequel ne permet notamment pas de lire les abondantes légendes dont j’illustre chaque photo. Il faut alors, dès l’ouverture, repérer en haut et au milieu de l’écran un bandeau jaune où il est écrit « Cliquer ICI pour revenir à Picasa ». (Attention, le message ne s’affiche pas très longtemps ; si vous ne le voyez pas, revenir en arrière d’une étape !). Il faut alors cliquer sur « ICI », et, miracle, tout l’album s’affiche sous forme de vignettes. Cliquer ensuite sur ‘Diaporama’ ; le Diaporama se lance alors avec la première photo…. puis faire comme le diaporama le propose : appuyer sur la touche F11 du clavier pour passer en ‘plein écran’… sur la touche Pause, et faire défiler soi-même ses photos à son rythme avec les flèches de direction du clavier.

Bonne lecture !

 

 

17 – En Bolivie : le Sud Lipez et le Salar de Uyuni

17 - En Bolivie : le Sud Lipez et le Salar de Uyuni

17 – En Bolivie : le Sud Lipez et le Salar de Uyuni

Dès notre arrivée après le coucher du soleil dans un modeste hôtel de la banlieue de notre première ville bolivienne, Tupiza, la patronne, Célia, nous ‘vend’ habilement un tour du Sud Lipez. Nous avions déjà consulté plusieurs agences de La Paz ou Uyuni par email, et Célia paraissait tellement sympathique que nous avons conclu tout de suite : dès le lendemain matin à 8h30, après avoir laissé nos motos dans leur garage et mis tous nos sacs et valises dans le Toyota, nous nous asseyions à l’arrière du 4×4 Landcruiser ‘Los Salares’ ; à l’avant, David, le chauffeur, et Elvis, le cuisinier ; retour à Tupiza prévu au soir du 4ème jour. Dépaysement garanti : au lieu de la vision panoramique et du grand air que nous avons au guidon de nos motos, vers l’avant, le pare-brise est encombré de multiples pare-soleil, gris-gris et autres colifichets tricotés ; sur les côtés, des vitres fumées, à ouverture électrique qui s’avéreront ne fonctionner que difficilement avant 11 h le matin, le temps que la température dégèle les rouages… de toutes façons, les pistes sont tellement poussiéreuses qu’il vaut mieux maintenir les vitres fermées si on ne veut pas être asphyxié !

Plusieurs personnes nous avaient recommandé ce tour de quatre jours, et il faut reconnaître qu’il restera un des ‘clous’ de notre voyage. Dès la première nuit, nous dormions à 4.200 m d’altitude dans le petit village de San Antonio de Lipez ; et, pendant les trois jours suivants, nous n’avons cessé de rester sur l’Altiplano, entre 3.600 et 5.000 mètres. Nous n’avons pas du tout souffert du froid, contrairement à ce qui nous avait été promis, la température n’étant jamais descendue en-dessous de +5°C ; en revanche, la pauvre Véronique avait attrapé quatre jours plus tôt une rhinopharyngite lui bloquant les sinus, et son adaptation à l’altitude – malgré toutes les précautions prises – fut laborieuse… pendant une quinzaine d’heures comprenant la première nuit, assortie de diarrhée, vomissements et terribles maux de tête malgré la mastication assidue de feuilles de coca achetées sur le marché de Villazon, dès l’entrée en Bolivie, j’ai bien cru qu’il nous faudrait redescendre. Mais nous avions déjà tous les deux gravi les monts Kenya (4.985 m) et Kililmandjaro (5.960 m) et connaissions les symptômes vraiment alarmants de l’inadaptation à l’altitude ; dès le second jour vers 11h, Véronique se remettait à parler autrement que par gémissements et pouvait commencer à profiter du spectacle féérique et ininterrompu.

Cette province du Sud Lipez, tout au sud de la Bolivie, borde la Puna argentine et l’Atacama chilien ; elle est totalement désertique : San Pablo, son chef lieu, abrite 220 habitants, et toute la province de 22.000 km² n’a que 5.100 habitants, soit une densité de population de 0,23 hab/km², douze fois inférieure à celle de la Patagonie… L’Est de la province, par où nous sommes entrés, est une steppe désertique, érodée de quebradas, entre 3.700 et 4.400 m. Le Sud, le long de la frontière argentine, entre 4.500 et 5.000 m, est parsemé d’anciens volcans (Lipiez, Uturuncu), de lacs, de salines et de sources thermales. L’Ouest, le long de la frontière chilienne, est le prolongement du désert chilien de l’Atacama : la grande sécheresse n’a pas empêché la formation de toute un chapelet de lacs aux couleurs toutes plus étonnantes les unes que les autres, dans lesquels se reflètent les neiges éternelles des volcans de la frontière ; l’altitude s’apaise en remontant vers le nord et les salars de Chiguana et Uyuni, ce dernier étant le plus vaste du monde. Au Nord de la province, on retrouve le climat semi désertique de l’Altiplano avec quelques villages et plantations, notamment de quinoa. On rencontre des lamas et des vigognes dans presque toute la région, toutes sortes de flamands – roses, blancs, de la Puna… – dans tous les lacs. Et les pistes y sont assez mauvaises, surtout dans l’Est… : notre vitesse moyenne tournait autour de 35 km/h ; sachant que nous avons parcouru 1.010 km, nous avons donc passé près de 30 heures à l’arrière de notre Toyota !

A côté des exceptionnels spectacles de la nature que vous allez voir dans l’album ci-joint, celui des populations qui ont vécu ou vivent encore par ici interpelle les Occidentaux que nous sommes. La région est riche de multiples minerais, notamment d’argent, d’or, de cuivre, de platine. Depuis le XVIème siècle, des mines ont été ouvertes un peu partout, souvent à des altitudes ‘invivables’ ; lorsque les filons de minerai ont été épuisés, ou lorsque, plus récemment, les cours se sont effondrés, les villages créées à côté des mines ont été abandonnés, plus ou moins vite. C’est-à-dire qu’on ne cesse de croiser : soit des villages abandonnés et complètement en ruine ; soit des villages encore vivants, occupant quelques maisons au milieu de ruines, et tentant de maintenir à titre privé un reste d’exploitation minière dans les conditions qu’on imagine, loin de tout, avec quelques troupeaux de moutons et de lamas ; soit des villages requinqués par l’arrivée du tourisme, avec quelques constructions récentes. Malgré quelques panneaux solaires, 99% de la population n’a pas accès à l’électricité ; en revanche, des instituteurs d’élite maintiennent en vie partout des écoles primaires, voire secondaires. Quant à nous, les touristes voyeurs, nos logements ont toujours été extrêmement sommaires, que cela soit dans les villages ou les usines à touristes. Ce tour fut donc assez sportif au total ; et une superbe introduction à la découverte de la Bolivie, où, dit-on, ‘tout est possible, mais rien n’est jamais sûr’ ! Comme vous allez le voir, nous allons expérimenter cette devise bolivienne plus au nord… mais ce sera pour la prochaine fois !

Je vous rappelle qu’en ouvrant l’album Picasa joint en cliquant sur la légende de la photo en tête d’article, c’est parfois Google+ qui s’ouvre au lieu de Picasa Web, lequel ne permet notamment pas de lire les abondantes légendes dont j’illustre chaque photo. Il faut alors, dès l’ouverture, repérer en haut et au milieu de l’écran un bandeau jaune où il est écrit « Cliquer ICI pour revenir à Picasa ». (Attention, le message ne s’affiche pas très longtemps ; si vous ne le voyez pas, revenir en arrière d’une étape !). Il faut alors cliquer sur « ICI », et, miracle, tout l’album s’affiche sous forme de vignettes. Cliquer ensuite sur ‘Diaporama’ ; le Diaporama se lance alors avec la première photo…. puis faire comme le diaporama le propose : appuyer sur la touche F11 du clavier pour passer en ‘plein écran’… sur la touche Pause, et faire défiler soi-même ses photos à son rythme avec les flèches de direction du clavier.

Bonne lecture !

16 – L’Argentine du Nord Ouest

 

16 - L'Argentine du Nord Ouest

16 – L’Argentine du Nord Ouest

 

 

 

Avec l’Argentine du Nord Ouest, nous achevons une première partie de notre périple en Amérique du Sud, celle qui consistait à rendre visite à nos cousins argentins et à découvrir les merveilles que la Nature avait placé chez eux. Mais dans le Nord Ouest de l’Argentine, s’il y a aussi ET des cousins, ET des merveilles de la nature… il y a EN PLUS que nous entrons dans un domaine géographique et historique différent, qui s’étend jusque tout au nord de l’Amérique du Sud.

Pour la géographie, on monte ! Depuis le détroit de Magellan, les Andes, c’était pratiquement une seule chaîne de montagnes, de plus en plus haute en allant vers le Nord, des 3.000 m des Payne aux presque 7.000 m de l’Aconcagua. A partir de maintenant, la Cordillère se multiplie : Occidentale, Centrale, Orientale… sans parler de multiples noms locaux ; entre toutes ces cordillères, qui culminent entre 5 et 6.500 m, se trouvent des plateaux, avec de gigantesques lacs et de gigantesques salines : il s’agit de l’Altiplano. Et comme le ‘courant de Humbolt’ – vous savez ? ce courant glacé qui remonte de l’Antarctique tout le long des côtes de l’Amérique du Sud, et qui disparaît, certaines années, sous son concurrent ‘El Niño’, et çà déclenche des catastrophes ? – donc, comme le courant (froid) de Humbolt – Alexander de Humbolt 1769 – 1859 : çà, c’était un vrai savant qui savait de quoi il parlait ! – eh bien disais-je, comme ce courant froid provoque de la sécheresse tout au long de cette côte (désert de l’Atacama, du Lipez, etc…), ce ne sont pas sur la côte mais à l’intérieur, sur l’Altiplano, à 3.600 m d’altitude en moyenne, que se sont développées depuis deux ou trois mille ans d’étonnantes civilisations.

Et c’est dès le Nord Ouest de l’Argentine que nous rencontrons l’Altiplano comme les premières traces de l’Empire Inca, détruit – avec 180 hommes et 37 chevaux – par le conquistador Pizarro au XVIème siècle. Une petit page d’histoire donc, qui nous servira jusqu’à la fin du voyage !

Après que Pizarro eut conquis l’Empire Inca en 1532, il restait à l’organiser. Dés 1542, Charles Quint crée la Vice Royauté du Pérou. Elle s’étend alors théoriquement de Panama jusqu’à la Patagonie, et du Pacifique jusqu’à l’Atlantique, et est subdivisée en ‘Audiences’, dont l’une est celle de ‘Buenos Aires’. Parallèlement, en 1561, une charte royale impose que tout le trafic transatlantique entre Séville et l’Amérique se fera exclusivement par une flotte semestrielle de galions : aucun navire ne pouvait quitter Buenos Aires à destination de l’Espagne, et tout le commerce devait passer par l’Altiplano, les Cordillères, Lima et l’isthme de Panama. C’est alors que furent fondées, tout au long de ce trajet, les grandes villes étapes que nous avons traversées dans notre ‘Argentine du Nord Ouest’ : Mendoza fut fondée dès 1561, Tucuman en 1565, Cordoba en 1573, et Salta en 1582.

Compte tenu des distances et des communications extrêmement lentes à travers les Andes, où les cols sont souvent bloqués par la neige en hiver, le système n’était pas très opérationnel ! Et lorsqu’en outre, en 1776, les Portugais, alliés aux Anglais, s’emparent du port de Colonia sur le Rio de la Plata (ce sont pourtant eux qui l’avaient fondé un siècle plus tôt… mais le Pape l’avait rendu aux Espagnols, cf. Chap. 7 ‘En Uruguay’), Charles III d’Espagne se décide à transforme l’Audience de Buenos Aires en Vice Royauté du Rio de la Plata. Celle-ci couvrait vers le Nord toute l’actuelle Bolivie : fin de la charte de 1561 ; c’est donc depuis la fin du XVIIIème siècle au moins – contrebandiers et tolérance avaient adouci les rigueurs de la Charte – que l’Argentine pourra se développer normalement.

Revenons à nos cousins !

–        Mendoza : n’avons rien vu ; non seulement aucun cousin d’importance n’y habite, mais nous n’y avons passé qu’une très courte nuit en redescendant des Andes ! Et pourtant, que n’avons-nous pas manqué ! Notamment des vignobles des meilleurs cépages importés par les Franciscains depuis 1561 ! Qu’on se le dise, les Argentins savent tellement bien faire du vin (5ème producteur mondial) qu’ils se le gardent pour eux : ils n’exporteraient que moins de 5 % de leur excellente production.

–        Cordoba : là, depuis le passage de nos neveux Marion et Manu en 2007, nous savions avoir droit à un accueil garanti. Certes, entre temps, les nièces avaient grandi, s’étaient mariées, et avaient des enfants, mais l’accueil n’en est pas moins resté à la hauteur de la tradition d’hospitalité de la famille Laxague. Cette ville de 1,5 Million d’hab, adossée à une Sierra de 2.000 m de haut, a grandi à partir d’une douane interposée dans le commerce entre le Rio de la Plata et le Pérou colonial. C’est aujourd’hui la ‘capitale culturelle de l’Amérique du Sud’.

–        Tucuman : sympathique étape d’un soir, dont les abords en plantations de cannes à sucre nous ont rappelé notre vie insulaire dans l’Océan Indien.

–        Salta : nous croyions, avant de partir de France, que Juan et Panki Laxague seraient nos contacts dans la province de Missiones. Mais Juan est à la retraite ! Heureusement, Christina a pris toutes les retraites, Juan a dû continuer de travailler quelques années, et il cultive une immense plantation de ‘calafates’ (une sorte de myrtille) à côté de Salta…. où il a maintenu, lui aussi, la tradition d’hospitalité des Laxague !

Route de Mendoza à la frontière bolivienne non pas sans histoire donc, mais en tous cas sans incident. Après Salta, nos motos sont montées jusqu’à 4.170 mètres voir les Salinas Grandes (3.500m), histoire de commencer à habituer nos organismes à l’altitude en montant et en redescendant. Et en quittant Tilcara (2.460 m) pour La Quiaca (où se trouve la frontière bolivienne, à 3.440 m), nous avons passé sur La Puna un col à 3.800 m, avant de redescendre à nouveau dormir à Tupiza (2.950 m), notre première étape bolivienne, en traversant notre premier vrai orage depuis le mois de … janvier. Cela ne nous empêchera pas de souffrir de l’altitude les jours et nuits suivants passés entre 3.600 et 5.000 mètres… mais nous vous raconterons pourquoi cela valait vraiment le coup au prochain chapitre !

En attendant, nous disons ‘Au revoir’ à l’Argentine et aux Argentins, et encore mille mercis pour votre accueil : vous savez que nous avons mis nos roues sur les routes de 19 de vos 23 provinces ? Nous espérons que les chapitres suivants vous donneront envie de venir visiter les Altiplanos boliviens et péruviens !

Je vous rappelle qu’en ouvrant l’album Picasa joint en cliquant sur la légende de la photo en tête d’article, c’est parfois Google+ qui s’ouvre au lieu de Picasa Web, lequel ne permet notamment pas de lire les abondantes légendes dont j’illustre chaque photo. Il faut alors, dès l’ouverture, repérer en haut et au milieu de l’écran un bandeau jaune où il est écrit « Cliquer ICI pour revenir à Picasa ». (Attention, le message ne s’affiche pas très longtemps ; si vous ne le voyez pas, revenir en arrière d’une étape !). Il faut alors cliquer sur « ICI », et, miracle, tout l’album s’affiche sous forme de vignettes. Cliquer ensuite sur ‘Diaporama’ ; le Diaporama se lance alors avec la première photo…. puis faire comme le diaporama le propose : appuyer sur la touche F11 du clavier pour passer en ‘plein écran’… sur la touche Pause, et faire défiler soi-même ses photos à son rythme avec les flèches de direction du clavier.

Bonne lecture !

 

15 – Le Chili central

15 - Le Chili central

15 – Le Chili central

Nous avions déjà visité les provinces du Chili les plus au Sud, celles de ‘Magellan’ (Punta Arenas) et de ‘Ultima Esperanza’ (sic !… Puerto Natales. Cf. Blog 13), s’étendant du Détroit au Parc de Torrès del Payne, puis celle d’Aysen (la Carretera Australe de Chile Chico à Tupaleufu). Nous y sommes revenus beaucoup plus au nord, remontant le Chili depuis Osorno jusqu’à Santiago et Valparaiso, le cœur du Chili économique, où se concentrent les 2/3 de la population. Une grande autoroute, la ‘Transaméricaine’ remonte tout le pays dans d’excellentes conditions. Les grands centres de Temuco et Santiago nous permettaient en outre de faire réviser nos motos après les épreuves subies sur le ‘ripio’ argentin de la ruta 40 et avant d’aborder l’altiplano bolivien, où elles auront à travailler dur, à des altitudes moyennes de 3.800 m.

Le Chili est un pays très attachant, coincé entre l’Océan Pacifique et la chaîne des Andes, où se trouve son point culminant, l’Aconcagua (6.962 m). S’étendant sur quelques 4.300 km du nord au sud pour une largeur moyenne de 180 km, couvrant plus de 750.000 km², la variété de ses climats est exceptionnelle, des déserts du nord (l’Atacama y abrite le fameux observatoire ALMA, inauguré ce mois-ci) aux régions subarctiques, en passant par toute la gamme des climats que nous aurions chez nous entre la Norvége et le sud marocain : lors des 500 km que nous avons parcourus en une journée entre Las Trancas et Santiago, nous avons quitté une station de montagne pour descendre dans un climat ‘toulousain’ aux magnifiques champs de maïs, avant de rencontrer nos premiers cactus, puis des palmiers, puis des bananiers… Ses 16 millions d’habitants travaillent dur, et le niveau économique du pays est élevé : en ce qui nous concerne, nous avons apprécié qu’il n’y ait notamment pas de problème de monnaie (pas de ‘marché bleu’ sur le peso chilien !), ni de ravitaillement en essence ; la vie en revanche y est relativement chère, comme en Europe pour un niveau de confort équivalent, ce qui semble laisser une partie importante de la population aux limites de la misère. Le pays a été colonisé par les Espagnols dès le XVIème siècle, lors de leur poussée vers le Sud à la suite de la conquête de l’empire Inca ; mais les Espagnols n’ont réussi à dominer ce qu’on appelle l’Araucanie – c’est-à-dire le cœur du pays Mapuche – qu’à la suite de longues guerres pendant lesquelles ils ont souvent eu le dessous, et qui ne se sont terminées qu’à la fin du XIXème s. ; d’où un regard porté par les Chiliens sur les importantes communautés indiennes subsistantes aujourd’hui beaucoup plus positif que ce que nous avions pu percevoir en Argentine.

Nous ne sommes restés que deux jours à Santiago, et deux jours à Valparaiso, à peine le temps de nous faire une idée superficielle de ces grandes villes célèbres ; mais nous avons été séduits par leur rythme et leurs couleurs comme par leur activité économique. Valparaiso, surtout, nous a enchantés : ces empilements décomplexés de maisons de toutes les couleurs dominant la rade, l’ambiance festive ‘en bas, sur le plan’, l’animation du côté du port, les fruits de mer, la lumière… un regret seulement, d’ailleurs étonnant : ce port n’est pas du tout tourné vers la mer, sans marina ni croisette… il faut dire que la mer y est paraît-il glaciale !

Mais notre morceau de bravoure de ces 2.000 km de routes aura – encore une fois ! – été motocycliste, même si malheureusement aucun reportage photographique ne peut vous le raconter : le franchissement des Andes du Chili vers l’Argentine, par le célèbre col du Christ Rédempteur (tunnel à 3.600 m) au pied de l’Aconcagua aurait dû être particulièrement photogénique ; la météo était idéale, et le spectacle annoncé féérique. Il s’est transformé en un cauchemar pour les vieux que nous sommes, qui avons dû en effet parcourir 1.150 km en deux jours, dont 270 km – c’est-à-dire tous ceux de la haute montagne à proprement parler – dans la nuit noire la plus complète. Des travaux routiers du côté de la station de ski de Portillo obligeaient en effet à une circulation à sens unique ; et au lieu d’organiser une circulation alternée toutes les 15 ou 30 minutes, la route vers l’Argentine n’était ouverte que de… 21h30 à 7h00. Arrivés au pied du col vers 12h30, nous avons d’abord dû patienter pendant 9 heures dans une vague auberge, en nous préparant à une nuit difficile. Lorsque la nuit bien noire s’est installée, nous avons commencé par escalader une infinité de vertigineux (ah ! ce sentier lumineux de phares, là bas, tout en bas… !) lacets en travaux, tentant de nous accrocher aux motos ‘sportives’ qui nous accompagnaient sans nous faire rattraper par la meute des voitures qui nous suivaient. Las ! En redescendant vers l’Argentine, nous avons manqué le poste de douane – qui n’était pas installé en travers de la route ! – et avons dû remonter 16 km… pour nous retrouver noyés dans le flot des voitures. Deux heures plus tard, minuit largement passé, il ne nous restait plus qu’à parcourir encore 180 km de routes sinueuses en restant bien éveillés jusqu’à Mendoza, atteint… sous la pluie… à 3h45. Nous garderons longtemps en mémoire le cerveau embrumé de ce noir tunnel glacé qui n’en finit pas, balayé par le pinceau des phares, avec quelques furtives visions, dans les quelques lignes droites, de l’immense voûte étoilée où se découpe l’ombre noire de parois, le froid qui s’infiltre, puis l’humidité qui revient en redescendant, les crampes et picotements des mains, l’attention qu’il faut recadrer sans cesse sur la route qui n’en finit pas de tourner, les haltes forcées pour la douane, faire le plein d’essence et de café, les phares de Véronique dans les rétroviseurs, le trafic sur ce grand passage international… et enfin de la grosse averse qui nous rince en croisant des semis remorques vers 3h00 du matin… Et le lendemain, nous avions encore 650 km à parcourir pour atteindre nos neveux Laxague de Cordoba, où nous arriverons sains et saufs avec de tout petits yeux bien fatigués ! Heureusement, leur accueil était à la hauteur de notre fatigue : nous vous raconterons cela la prochaine fois !

Je vous rappelle qu’en ouvrant l’album Picasa joint en cliquant sur la légende de la photo en tête d’article, c’est parfois Google+ qui s’ouvre au lieu de Picasa Web, lequel ne permet notamment pas de lire les abondantes légendes dont j’illustre chaque photo. Il faut alors, dès l’ouverture, repérer en haut et au milieu de l’écran un bandeau jaune où il est écrit « Cliquer ICI pour revenir à Picasa ». (Attention, le message ne s’affiche pas très longtemps ; si vous ne le voyez pas, revenir en arrière d’une étape !). Il faut alors cliquer sur « ICI », et, miracle, tout l’album s’affiche sous forme de vignettes. Cliquer ensuite sur ‘Diaporama’ ; le Diaporama se lance alors avec la première photo…. puis faire comme le diaporama le propose : appuyer sur la touche F11 du clavier pour passer en ‘plein écran’… sur la touche Pause, et faire défiler soi-même ses photos à son rythme avec les flèches de direction du clavier.

Bonne lecture !

14 – Rutas 40 et Australe : la Patagonie des Glaciers

14 - Les Rutas 40 et Australe : la Patagonie des Glaciers

14 – Les Rutas 40 et Australe : la Patagonie des Glaciers

 

 

Deux chapitres du blog mis à jour successivement, vous allez avoir des nouvelles des Perrin, et de la lecture pour les journées d’hiver qui reviennent ! Commencez par le chapitre « 13 – La Patagonie des Lacs à Magellan », qui raconte notre lente et longue descente, du 29 janvier au 21 février, jusqu’au détroit de Magellan : quelle aventure ! Nos temps libres y ont été consacrés à rédiger le chapitre 12… et cela fait donc déjà un mois que nous ne vous avions pas donné de nouvelles !

Le présent chapitre 14 raconte comment un groupe d’amis Parisiens nous a rejoints au Chili au pied des ‘Torrès del Paine’, et nous a accompagnés vers le Nord pendant plus de 2.000 km tout au long de célèbres routes touristiques passant par des sites naturels exceptionnels. J’espère qu’il vous donnera envie de venir ici les admirer en vrai ; en attendant, en voici un acompte !

Depuis au moins trois ans que nous évoquons autour de nous que notre cinquième voyage sera consacré à l’Amérique du Sud, et notamment à l’Argentine où vivent de nombreux cousins de Véronique, nous avons en effet fait la connaissance des frères Patrice et Thierry Ossent, qui, tous deux motards, y ont été élèves au lycée Mermoz de Buenos Aires il y a quelques décennies, et qui reprenaient contact avec leurs anciens copains à l’occasion de l’anniversaire du lycée. Il était évident que mon compagnon de voyage ‘autour du Mt Ararat’ de l’année dernière, Bernard Champanhet, ferait partie de l’expédition ; s’y sont greffés de vieux amis du groupe, les Jozan. L’idée était que d’innombrables merveilles de la nature du Sud des Andes ne sont accessibles que par de mauvaises pistes, et qu’elles seraient plus aisément praticables par nos motos allégées de leurs bagages dans les voitures d’accompagnement ; et si on pouvait ‘tourner’ de guidons en volants.

Nous avons donc appris, après notre arrivée sur le continent américain, que nous avions rendez-vous avec eux sept le 21 février 2013, dans l’après-midi, à l’entrée du parc des Torrès del Paine, au Chili… Un vrai cauchemar de randonneur ! Non seulement un lieu précis, mais quasiment une heure précise au milieu de nulle part, à des centaines de kilomètres de tout centre urbain. Nous qui voyageons toujours sans savoir où nous coucherons le surlendemain ! Comment être sûr d’être au rendez-vous ? Et s’il fait trop mauvais temps ? Et si une des motos crève ou bien est en panne ? Et si nous n’avons plus envie ? Nous ne sommes pas des chauffeurs de Shuttle/Navettes aéroport/chutes du Niagara ! Pour plus de sûreté, nous avions prévu quatre jours de marge… qu’une tempête nous a complètement mangés à Punta Arenas ! En outre, nous avons dû nous préparer psychologiquement au choc des rythmes : quant à nous, trois mois que nous étions partis sur les routes, et trois autres mois avant de rentrer en France… quant à eux, partis la veille de l’hiver parisien, des réservations d’avion pour la reprise de leurs activités en France les attendaient douze jours plus tard… et 2.200 km plus au nord. Le choc fut finalement largement aussi brutal que redouté, mais la joie des retrouvailles et des spectacles de la nature admirés en commun fut à la même hauteur.

Parce que les photos que vous allez voir dans l’album ci-joint sont celles de sites exceptionnels. Il y a d’abord la montagne ; la grande montagne ; celle que les meilleurs ‘Alpinistes’ (‘Andinistes’) du monde entier viennent tutoyer ; il y a des parois et des cimes ici dont l’histoire de la conquête n’a rien à envier à celles des faces Nord de l’Eiger ou des Grandes Jorasses : les ‘Tours’ du Payne, le Cerro Torre, le Fitz Roy notamment. Il y a ensuite cette merveille unique de la nature qu’est le gigantesque glacier ‘Perito Moreno’ se jetant – au rythme de 2 mètres par jour en moyenne – dans le lac Argentino sur un front de 5 kilomètres. Il y a enfin deux routes mythiques, que les motards du monde entier rêvent de parcourir au moins une fois dans leur vie : la ‘Ruta 40’, qui parcourt toute l’Argentine depuis la frontière bolivienne jusqu’au détroit de Magellan en longeant au plus près la cordillère des Andes ; elle suit plus au moins le chemin que le grand’père Jacques de Larminat (cf. Blog 12) a suivi en 1908/1909 à la recherche d’une estancia à acheter ; en ce début de 2013, il en restait quelques centaines de kilomètres en chaussée ‘consolidée’, c’est-à-dire en ‘ripio’. Et la ‘Carretera Australe’, dont le Général Pinochet lança la construction en 1986 : 1.250 km pour rejoindre par la route le port de Puerto Montt (41° S) à Villa O’Higgins (45° S), « le long » d’une côte de l’océan Pacifique qui ne cesse d’être découpée en profonds fjords et hautes montagnes couronnées de glaciers ; superbe, donc, mais d’autant plus rude qu’il y pleut toute l’année et que le ‘consolidé’ y domine largement…

Bonne lecture, donc, et n’oubliez pas de nous mettre des petits messages ; vous n’imaginez pas combien ils font plaisir !

Je vous rappelle que, pour les albums, il faut cliquer sur la légende de la photo en tête de l’article, et que si c’est Google+ qui s’ouvre au lieu de Picasa, il faut « Cliquer ICI pour revenir à Picasa » ! Mais vous connaissez maintenant la musique !

13 – La Patagonie des Lacs à Magellan

13 - La Patagonie des Lacs à Magellan

13 – La Patagonie des Lacs à Magellan

 

La Patagonie est loin de constituer un tout homogène ; elle est diverse tant par ses climats et sa végétation que par ses paysages : on y trouve le désert, la steppe, les forêts ‘alpines’ ou antarctiques, les rios, les lacs, les montagnes et les glaciers, les ‘alpages’, les champs et les fjords… Il y une Patagonie sèche et une Patagonie humide, plus ou moins glacées en hiver ou brûlante en été… L’unité de toutes ces régions, à part la difficulté d’y vivre, et donc sa densité extrêmement faible de population ? C’est le vent ! A la différence de ce qui se passe dans l’hémisphère nord, ici, dans l’hémisphère sud, soufflent toute l’année, mais surtout pendant l’été austral, dès le 40ème parallèle (soit la latitude de Madrid ou du sud de la Tasmanie) ceux que les marins nomment « les 40ème rugissants », qui se transforment en « 50ème hurlants » 10° plus au sud. Le Cerro de Los Pinos est situé sur le 40ème parallèle, et Punta Arenas, le point le plus austral de notre périple, sur le 53ème , alors qu’Ushuaia est sur le 56ème, latitude de… Copenhague dans l’hémisphère nord.

Dans les images ci-jointes, vous nous verrez descendre tous ces parallèles et traverser toutes ces Patagonies, traversant les déserts, longeant la côte Atlantique, rencontrant le vent, puis le froid en descendant toujours plus vers le Sud, jusqu’à la ‘Ruta del Fin del Mundo’ pour atteindre Punta Arenas, sur les bords du détroit de Magellan. Certains parlent de monotonie quand on descend par la route – goudronnée ! – n°3, mais nous ne nous y sommes jamais ennuyés, brutalement réveillés au guidon de nos motos par les violentes claques de vent reçues à chaque croisement de camions ou de bus ! Ma tête est pleine de calculs pour savoir s’il y aura du carburant à la prochaine station marquée sur la carte, mais beaucoup ont disparu, manifestement depuis des années… ll est tout à fait impossible de s’arrêter du tout, ne serait-ce que pour faire une courte pause, en-dehors d’une zone aménagée, car les bas côtés ne permettent pas de poser la moto en sécurité, menacées par le vent et le trafic, et il n’y a guère d’autres zones ‘aménagées’ que dans les stations services. Le soir, après l’étape, nous sommes tous deux frigorifiés et courbatus des bras et du dos d’avoir lutté pendant des heures contre le vent latéral… Les guanacos (sortes de lama) et les nandous (petites autruches locales) partagent les maigres pâturages de moutons et chevaux en liberté ; des estancias se devinent, de loin en loin, cachées dans un bosquet de peupliers, sous des ciels et lumières photogéniques, surtout lorsque des nuages cachent le soleil ; des jeux d’ombres et de lumières parcourent alors la steppe à grande vitesse, faisant et défaisant les mirages, et notre moral change au même rythme : le monde devient hivernal dès que le soleil se cache plus de quelques minutes, puis estival dès que nos blousons se réchauffent sous le soleil !

Les photos ci-jointes racontent notre chute sur le ‘ripio’ en revenant d’une forêt d’arbres pétrifiés dans un désert coloré, les manchots de Magellan sur les plages de l’Atlantique, pourquoi nous avons renoncé à atteindre Ushuaia et la magie des glaciers suspendus des montagnes entourant Puerto Natales, situé sur la côte de l’océan Pacifique. Nous avons pris notre temps pour descendre, nous arrêtant souvent deux nuits de suite au même endroit pour nous imprégner de cette Patagonie sauvage, de ces habitants intrépides ‑ qu’ils soient descendants d’Indiens ou de colons Européens ‑ vivant dans des conditions d’isolement que nous autres Parisiens avons du mal à imaginer ; leurs maisons sont barricadées de bardages métalliques. Le dépaysement vient aussi de l’australité de la région : il faut s’habituer à ce qu’ici, ‘la lune ne ment pas’, c’est-à-dire que, au contraire de ‘notre’ lune en France, quand elle dessine un ‘C’, c’est bien qu’elle Croît, et un ‘D’, qu’elle Décroît ! Et à ce que, lorsque c’est le vent du Sud qui souffle, cela annonce le froid et le beau temps, à la différence du vent du Nord, qui apporte l’humidité de l’Equateur. Les chambres d’hôtel exposées au Nord ont le soleil toute la journée, et les glaciers, bien sûr, sont sur les faces Sud des montagnes, les plus difficiles à gravir. L’étoile Polaire a disparu depuis longtemps, et les ciels nocturnes, étincelants, sont dominés par la Croix du Sud et les nuages ‘de Magellan’. L’humidité revient dans le Sud dès que les Andes ont perdu suffisamment d’altitude pour laisser passer l’humidité de l’océan Pacifique, mais le vent gagne alors en puissance : toute la végétation y est tordue par le vent dominant du nord ouest. A Punta Arenas, où nous sommes restés bloqués 4 jours par un vent hurlant à plus de 120 km/h, nous avons pu visiter les nombreux musées qui racontent l’histoire de cette terre d’exception… vous en retrouverez quelques éléments dans les photos ci-jointes.

Bonne lecture !

 

Je vous rappelle aussi que parfois, en ouvrant l’album Picasa, c’est en fait Google+ qui s’ouvre, qui ne permet notamment pas de lire les légendes dont j’orne chaque photo. Il faut alors, dès l’ouverture, repérer en haut et au milieu de l’écran un bandeau jaune où il est écrit « Cliquer ICI pour revenir à Picasa ». (Attention, le message ne s’affiche pas très longtemps ; si vous ne le voyez pas, revenir en arrière d’une étape !). Il faut alors cliquer sur « ICI », et, miracle, tout l’album s’affiche sous forme de vignettes. Cliquer ensuite sur ‘Diaporama’ ; le Diaporama se lance alors avec la première photo…. puis faire comme le diaporama le propose : appuyer sur la touche F11 du clavier pour passer en ‘plein écran’… sur la touche Pause, et faire défiler soi-même ses photos à son rythme avec les flèches de direction du clavier.

12 – Au Cerro de los Pinos

12 - Le Cerro de los Pinos

12 – Le Cerro de los Pinos

 

 

 

Un des ‘clous’ de notre voyage en Argentine devait être la visite de l’héroïne de ‘Pionniers en Patagonie’ (Privat 2007, Préface de Jean Raspail), c’est-à-dire l’estancia familiale du Cerro de los Pinos… et il s’est trouvé que tout fut réuni pour que notre séjour y ait été comme un rêve éveillé ! L’album de photos ci-joint vous en donnera un petit aperçu : sous un ciel tout bleu et sans vent, nous avons eu la chance de croiser les quatre tantes Larminat, vivant depuis toujours sous le même toit dans ce petit bout de Patagonie ; le lodge Tipiliuke, plein à craquer de pêcheurs et chasseurs du monde entier venus titiller les truites du Chimehuin ou les hardes de cerfs ; la ‘Rural’, foire agricole de Junin de los Andes qui se tenait le week end où nous étions là et attire toute la jeunesse des estancias voisines ; Pierre et Marie-Thérèse de Larminat, et surtout Miguel et Isabelle de Larminat qui nous ont reçus avec une infinie disponibilité dans leur magnifique maison.

Tout commence dans les années 1900, lorsqu’autour de la table dominicale de la Hardonnière, en Sologne, le patriarche Jean de Larminat expose aux sept garçons nés de son premier mariage que l’avenir et la sécurité de la famille – le ‘colon’ était à l’honneur en ce temps là ‑ impose que certains d’entre eux aillent fonder un établissement Outre-mer. Après avoir longtemps débattu ensemble de la destination (l’Algérie ou le Maroc ? La Nouvelle Calédonie ?…), c’est Jacques, le 4ème, qui s’y colle ; il n’a pas 20 ans, et part, muni de lettres de créances, pour Buenos Aires. Il se fait engager dans une estancia pour apprendre le métier de ‘gaucho’, puis parcourt à cheval la Cordillère avec quelques compagnons jusqu’à la Terre de Feu, avant de fixer son choix au nord de la Patagonie, à quelques kilomètres de la frontière chilienne, dans la vallée du Chimehuin : ce sera le ‘Cerro de los Pinos’. Le courrier met 2 à 4 mois pour faire l’aller-retour… Jean lui envoie l’aîné, Etienne, qui est majeur et peut procéder, en 1909, à l’acquisition pardevant notaire à Santiago de Chili. André et Bernard suivront ; mais tous rentrent se battre en France pendant la 1ère guerre mondiale, et ces derniers y laisseront leur peau. A la fin de la guerre, Jean envoie alors François et Robert pour les remplacer, et chacun des frères ramène à tour de rôle une épouse de France… les quatre frères se marient en 1919, 1920, 1921 et 1924… aux tout débuts, frères et belles-sœurs doivent cohabiter dans la même maison, puis on achète du bois et on en construit de nouvelles, tout en plantant des arbres à tour de bras pour couper de vent infernal qui souffle toute l’année ; leur demi-sœur Paule a merveilleusement raconté dans son journal, dans un très elliptique style Larminat, la vie de l’estancia, où elle passa l’année 1925 : la traversée en bateau, le train jusqu’à Neuquen, la ‘voiture’ et les bœufs enfin pour arriver au Cerro ; les hommes toute la journée sur le campo ; les belles-sœurs au potager, au poulailler, et aux nombreux enfants, avec les accouchements, les maladies, les décès en bas âge, les célébrations, les intempéries, l’isolement… quelle cohabitation ! C’étaient vraiment des ‘pionniers’. Etienne enfin, fait un grand pas en décidant d’aller installer sa famille sur la rive gauche du Chimehuin : sérénité mais isolement seront le lot de son épouse Geneviève ; leur maison brûlera en 1968, et ils partiront à la retraite à Sierra de la Ventana. Quant à la toute première maison, elle brûla en 2005, avec toutes ses archives, et il n’en reste que la cuisine, où se tiennent donc toujours toute la journée quatre des filles du pionnier Jacques, aujourd’hui âgées de 78 à 90 ans. Véronique descend d’une tante Adèle de Larminat, sœur du patriarche Jean. Miguel et Pierre sont des petits fils de Jacques. Et la tante Elisabeth Laxague – la mère des 19 enfants ‑ est la fille du pionnier Etienne.

Comment dire l’émotion qui nous a envahis à notre arrivée au Cerro, avec nos motos venant de Paris ! Tous les éléments du tableau étaient à leur place, sauf que nous étions dans la réalité : la pointe du Cerro dominant le paysage, les bras et méandres du Chimehuin scintillant au soleil, l’oasis de grands arbres au milieu de la steppe jaunie de Patagonie, les kilomètres de clôtures, les vaches avec de l’herbe jusqu’au poitrail, les maisons et hangars de bois, puis de pierre, avec les corrals aux chevaux, les jardins et massifs entourant chacune des maisons… et, personnages vivants dans ce tableau, des cousins et tantes nous accueillant comme de la famille !

Nous espérons que les photos de l’album ci-joint – n’en manquez pas les légendes ! ‑ vous donneront un peu une idée de l’incessant combat contre la nature qu’a été le travail de trois générations de pionniers !

La prochaine fois, nous vous raconterons notre longue descente de la Patagonie, quelques 3.000 km du Cerro jusqu’au parc chilien de Torrès el Paine : quelles immensités, d’une sauvagerie à la limite de la brutalité !

 

Je vous rappelle que, pour accéder à l’album de photos, il faut cliquer sur la légende de la photo en tête de l’article.

Je vous rappelle aussi que parfois, lorsque l’album ‘Picasa’ s’ouvre, Google+ propose ‘par défaut’ une présentation de l’album sous forme d’une ‘Galerie’, où on ne peut notamment pas lire les légendes dont j’orne chaque photo. Il faut alors, dès l’ouverture, repérer en haut et au milieu de l’écran un bandeau (près de la ‘barre de titres’ où s’affichent les liens ‘http://, etc…’) où il est écrit (en jaune) quelque chose comme « Cliquer ICI pour revenir à Picasa ». (Attention, le message ne s’affiche pas très longtemps ; si vous ne le voyez pas, revenir en arrière d’une étape !). Il faut alors cliquer sur « ICI », et, miracle, tout l’album s’affiche sous forme de vignettes. Cliquer ensuite sur ‘Diaporama’ ; le Diaporama se lance alors avec la première photo…. puis faire comme le diaporama le propose : appuyer sur la touche F11 du clavier pour passer en ‘plein écran’… sur la touche Pause, et faire défiler soi-même ses photos à son rythme avec les flèches de direction du clavier.

11 – En Patagonie !

11 - En Patagonie !

11 – En Patagonie !

 

 

 

 

C’est avec une certaine émotion que nous franchissons le cours des rios Colorado et Negro, qui marquent traditionnellement l’entrée dans un monde différent de tout ce que l’on connaît : la Patagonie. La région s’étend sur 2.500 km jusqu’au détroit de Magellan, et des Andes jusqu’à l’océan Atlantique, sur plus d’un million de km². Région mythique, fantasme de tous les explorateurs, habitée par des peuples Indiens depuis plus de 10.000 ans (35.000 pour les plus anciennes traces prouvées, du côté de Puerto Montt au Chili) … même aujourd’hui, avec l’immigration européenne, elle est à peine plus peuplée que la Sibérie (3,8 hab/km²). La région inspire le respect : à part sur la lune, c’est l’endroit le plus éloigné où l’espèce humaine est jamais venue… mais même la lune sans doute n’aura jamais autant fait travailler l’imagination des hommes. La Patagonie est traditionnellement une terre d’exil et de colonie. Au cours des siècles, une grande partie de sa population y est venue, attirée comme par un aimant, pour ses grands espaces loin de tout, où l’on pouvait espérer faire fortune et surtout y commencer un monde nouveau : les ancêtres des gens qui habitent ici ont pour la plupart quitté leur pays, pour de multiples raisons, afin de bâtir du neuf. Et une des particularités des gens qui habitent la Patagonie est d’avoir gardé un fort attachement pour leur patrie. Il y a quelque part, comme l’écrit justement Bruce Chatwin (‘En Patagonie’), quelque chose du mythe de l’agriculteur Caïn chez ces indomptables Patagons qui ont jeté l’ancre ici sur ces terres infiniment hostiles.

Parce que la nature y est hostile ! Ce n’est certes pas un désert de dunes et de sables comme en Arabie et au Sahara, mais il a lui aussi suscité d’immenses expériences humaines à défaut de spirituelles. Charles Darwin, lors de son voyage sur le ‘Beagle’ (1836) qui devait être si déterminant pour la conception de sa théorie de l’évolution des espèces, y fut irrésistiblement attiré par… tous les aspects effrayants et négatifs de ces immensités arides : « Les jours suivants, le paysage continua à rester extrêmement inintéressant ; (…) c’est le sceau de la stérilité qui a frappé tout ce pays (…). Mais, quand je me remémore des images de mes voyages, ce sont souvent les plaines de Patagonie qui reviennent ; pourtant, ces plaines sont de loin les plus abandonnées et inutiles que je connaisse… leurs caractéristiques sont uniquement négatives : sans habitations, sans eau, sans arbres, sans montagnes, elles n’ont que quelques plantes rabougries : comment alors – et il n’y a pas qu’à moi que cela arrive – ces immenses étendues arides ont-elles réussi à prendre à ce point possession de mon esprit ? »

Dès la sortie de Bahia Blanca, nous abandonnons l’herbe de la Pampa pour entrer dans ces espaces stériles et surchauffés en traversant la ‘Plaine des Vents’, jouant avec les mirages sur une immense ligne droite de 250 km qui traverse une maigre steppe grise. Entre deux bras du fertile rio Negro, à Choele Choel se trouvent deux campos de cousins, d’environ 100 ha chacun, ceux des Stier et de Véronique Hary-de Larminat. Et comme m’expliquait Laurent Stier à Buenos Aires, pour le même prix, il vaut mieux un petit 100 ha irrigué par le rio Negro que 2.500 ha de steppe patagonne ! Mais il y a aussi de grandes et belles estancias, notamment lorsque la route s’élève doucement vers la chaîne des Andes, avec ses premiers volcans et ses premières taches blanches de névés en ce milieu de l’été ; il y a de l’eau partout ici, avec rivières, lacs et cascades. Fernando et Mercédès Lopez-Laxague nous accueillent à Aluminé, à quelques kilomètres de la frontière chilienne. Fernando y est gérant d’une estancia assez particulière, l’estancia Pulmari de quelques 112.000 ha ; il me fait beaucoup parler en espagnol, puis nous découvrons qu’il comprend mon français aussi bien que moi son espagnol ! Il m’explique que l’estancia appartient à l’Etat, plus précisément à trois entités aux intérêts divergents, et il doit se battre entre le gouverneur de la Province de Neuquen, celui de la Province de Buenos Aires et… l’Armée, sans parler du fait que le domaine contient une partie du Parc National Lanin et est limitrophe d’une frontière par laquelle passent de nombreux trafics… Entre le renouvellement des plantations de pins et eucalyptus, la préservation de la plus grande forêt d’araucarias du monde, la vie économique des villages mapuche, l’implantation des lodges et cabañas et la surveillance des touristes chasseurs, pêcheurs ou randonneurs, Fernando a tellement de travail qu’il doit rester la plus grande partie de son temps à son bureau d’Aluminé. Il est d’autant plus heureux de nous en faire faire le tour du propriétaire, nommant chaque gibier de poil ou plume et chaque arbre ou bambou par ses noms espagnol, mapuche et scientifique. Et nous arrivons pour assister à la très rare floraison des bambous, qui n’a lieu que tous les quarante ans !

Nous sommes en pleine Araucanie ici, le royaume éphémère du Périgourdin Orélie-Antoine 1er de Tounens (1860). Et une stèle non loin du lac Pulmari marque le lieu de la dernière bataille entre le Général Roca et les tribus mapuche (1884), clôturant ce que la tradition argentine appelle la ‘Conquête du Désert’. Comme l’explique Wikipedia : « Le nom même de la dite campagne rend compte de la manière dont les peuples autochtones étaient perçus à l’époque : comme des sauvages qu’il n’y avait qu’à exterminer puisque, malgré leur présence sur ces terres habitées, on appelait ces terres un désert. Roca, à la tête d’une puissante armée moderne et bien entrainée parvint à soumettre la Patagonie en venant à bout de la résistance tenace des peuples de l’ethnie mapuche, causant un nombre épouvantable de victimes. On estime que la guerre fut la cause directe de la mort de plus de 20 000 indigènes non combattants (femmes, enfants, vieillards). » Et comme en atteste la légende d’une gravure, vue au musée de la Patagonie de Bariloche, montrant des Indiens pillant une estancia (1890) : « Depuis des temps immémoriaux, la Pampa était habitée et dominée par des tribus sauvages qui vivaient du pillage sur les établissements situés au sud de Buenos Aires ». Véronique a longtemps travaillé, dans un domaine différent (l’antijudaïsme chrétien), sur le ‘devoir de mémoire’ et des déclarations de ‘repentance’ (la déclaration dite ‘de Drancy’), qui n’accusent pas nos pères. Elle pense que l’Argentine en est encore loin ! Et a beaucoup apprécié le travail effectué par nos cousins argentins envers les Mapuche !

La prochaine fois, nous vous parlerons de la magnifique estancia familiale du Cerro de los Pinos, fondée par nos oncles en 1909, aujourd’hui 20.000 ha sur les bords du Chimehuin. Que ceux qui n’ont pas la patience d’attendre se précipitent sur le passionnant ‘Pionniers en Patagonie’ de Miguel de Larminat !

Je vous rappelle que, pour accéder à l’album de photos, il faut cliquer sur la légende de la photo en tête de l’article.

OU sur le lien ci-dessous :

https://picasaweb.google.com/113501550221338298900/11EnPatagonie?authuser=0&feat=directlink

Je vous rappelle aussi que parfois, lorsque l’album ‘Picasa’ s’ouvre, Google+ propose ‘par défaut’ une présentation de l’album sous forme d’une ‘Galerie’, où on ne peut notamment pas lire les légendes dont j’orne chaque photo. Il faut alors, dès l’ouverture, repérer en haut et au milieu de l’écran un bandeau (près de la ‘barre de titres’ où s’affichent les liens ‘http://, etc…’) où il est écrit (en jaune) quelque chose comme « Cliquer ICI pour revenir à Picasa ». (Attention, le message ne s’affiche pas très longtemps ; si vous ne le voyez pas, revenir en arrière d’une étape !). Il faut alors cliquer sur « ICI », et, miracle, tout l’album s’affiche sous forme de vignettes. Cliquer ensuite sur ‘Diaporama’ ; le Diaporama se lance alors avec la première photo…. puis faire comme le diaporama le propose : appuyer sur la touche F11 du clavier pour passer en ‘plein écran’… sur la touche Pause, et faire défiler soi-même ses photos à son rythme avec les flèches de direction du clavier.