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Véronique et Philippe PERRIN ont notamment travaillé pendant près de 25 ans en parcourant l'Afrique Noire, avant de s'épuiser en sédentaires à Paris en rêvant de découvrir d'autres parties du monde. A l'âge de la retraite, après avoir élevé leurs 5 enfants, ils ont décidé que leurs rêves deviendraient réalité.

4 – En Amérique ! Escale à Rio de Janeiro

Bonjour ! Cette fois, nous sommes à l’ancre devant Santos, le grand port situé à 90 km de Sao Paulo, la 3ème plus grande ville du monde, à 400 km au Sud de Rio, juste sur le ‘Tropique du Capricorne’ (pour ceux qui sont allés se renseigner sur ce qu’est ce ‘tropique’ après lecture de la note précédente !). Et… repetita placet… comme à Rio, l’économie brésilienne étant en plein boom… nous sommes depuis cette nuit ‘en rade’ au large du port, en compagnie d’une trentaine d’autres cargos, attendant qu’une hypothétique place se libère pour accoster. La mer est calme, le ciel légèrement plombé ; il fait un peu lourd ; nous pouvons deviner, vers le nord, au loin dans la brume, les immeubles du front de mer de la ville. Le site est beaucoup moins prestigieux que la ‘rade de Copacabana’ au large de Rio de Janeiro !

 

C’est là en effet que nous vous avions quitté il y a trois jours. Nous étions alors sur le point – enfin ! ‑ de lever l’ancre après 36 heures de quarantaine pour aller chercher notre quai dans la zone portuaire de ‘Caju’, tout au nord de la ville, ce qui impliquait un parcours très touristique. Et en effet, comme au théâtre, Rio s’est déroulée devant nous pendant plus d’une heure. Le site de cette ville est proprement extraordinaire : au Nord, l’immense baie de Guanabara, coupée en deux par le pont autoroutier de Niteroi ; au Sud, l’océan Atlantique par où nous sommes arrivés ; entre les deux, une ‘passe’ de 4 km de long et 1 km de large, marquée par de spectaculaires formations de basalte noir habillées de forêt tropicale, dont le fameux ‘Pain de Sucre’, à l’ouest, côté ville. Si la côte Est paraît encore verte et sauvage, celle de l’Ouest, où se situe l’essentiel de cette ville de 6 millions d’habitants, associe de façon invraisemblable des forêts d’immeubles, des autoroutes et des plages… à une autre forêt … de pains de sucres vertigineux. Celui du ‘Corcovado’ (‘le bossu’ – forme de ce pain) culmine à 700 m de haut, et porte les 1.100 t. et 40 m de haut de la statue du Christ Rédempteur. Nous avions souvent vu des photos de Rio… nous n’avions pas imaginé cette forêt de pains volcaniques, et un relief à ce point tourmenté, qui découpe la côte et la ville en une infinité de criques et caps, de quartiers résidentiels, de bureaux ou de favellas difficilement reliés les uns aux autres.

Nous n’avons pu malheureusement mettre pied à terre que sur le coup de 19h, et sortir du port que vers 20 h… la nuit largement tombée, tout éventuel bureau de change aussi, avec promesse faite au Capitaine d’être rentrés au plus tard à 3 heures du matin. Nous savions bien qu’il ne faut pas, qu’il ne faut jamais, marcher à pied de nuit dans ces villes une fois la nuit tombée. Sans parler de marcher à pied de nuit dans une zone portuaire… Mais c’était la 1ère fois que nous mettions pied à terre depuis Dakar, et n’avions encore jamais mis les pieds en Amérique du Sud ! Et nous avions tellement été mis en appétit par cette entrée dans la baie… Bien sûr, les promenades prévues au ‘Pain de Sucre’, au ‘Corcovado’, au ‘Jardin Tropical’ ou sur la plage de Copacabana étaient à l’eau, mais nous avions au moins le prétexte d’aller mettre en ligne une mise à jour du blog, et de poster une carte aux copines ‘Aquarelles’ ! Et donc de trouver un café Internet ainsi que des timbres et une boîte aux lettres… çà pouvait se faire en taxi… Mais voilà, sortis de l’enceinte portuaire, ce vendredi soir, nous tombons sur un embouteillage de milliers d’autobus englués, presque en silence, dans des nuages de pollution ; évidemment pas de taxis. Nous prenons donc nos jambes en direction du centre, à 7 ou 8 km, au bord d’une autoroute située … sous une autre autoroute, entourées toutes deux des murs d’enceinte du port. Oui, franchement un peu glauque ! Mais, bon, à part le trottoir défoncé, les recoins et portails entrouverts, les zones pas éclairées, nous croisons de temps à autres des gens ‘normaux’, une femme seule avec sa valise, deux jeunes se tenant par la main… un cri derrière, un homme qui court ; coincés entre un bus en panne et un muret, Véronique me lâche la main, nous devons nous plaquer pour le laisser passer ; tout simplement quelqu’un de pressé, qui ne trouvait pas non plus de taxi…. Nous finissons par en trouver un ; nous lui suggérons un Café Internet à ‘Santa Teresa’… C’est tout là haut, sur l’une des collines, le ‘Montmartre’ de Rio, très branché, mais l’Internet y a disparu pour un simple café avec Wifi ; malheureusement, nous avons laissé notre ordinateur à bord du bateau… nos lecteurs attendront ! En revanche Véronique explique son histoire de ‘carte aquarelle’ à la serveuse, elle paraît passionnée, et elles s’embrassent après promesses de la poster avec le généreux pourboire que je suis contraint de laisser faute du moindre Real en poche ! Retour à bord avec un autre taxi qui nous fait les présentations du ‘Centro’ dans son brésilien gentiment hispanisant pour nous…

A minuit à bord, nous nous remettons des émotions de cette première prise de contact avec l’Amérique latine : nous sommes infiniment séduits ! Si la chaleur et l’humidité du climat sont ‘africaines’, nous n’avons jamais rencontré une telle gentillesse, tant de sourires, tant de patience et de disponibilité. Nous n’avons jamais été ‘regardés de haut’, ni été l’objet de curiosité ; nous ne sommes pas ici perçus comme peuvent l’être les ‘Blancs’ en Afrique, ou les ‘Français’ au Maghreb, ou même les ‘Européens’ en Turquie ou en Iran…. sans doute comme s’il était normal ici, dans ce pays bigarré, ce creuset culturel, d’être différent des autres ! Et le tout, dans une ambiance malgré tout très ‘européenne’, justement en ce sens que d’emblée, ce sont des rapports d’égalité qui sont établis avec les gens.

 

Je vous rappelle que pour accéder à l’album de photos joint, vous cliquez sur le lien ci-dessous, ou ouvrez l’album ‘4 – En Amérique ! Rio’ en haut de la colonne à droite. S’ouvre alors un Album ‘Picasa’, que je recommande de lire en mode ‘Plein Ecran’ (F11 sur Windows), et ‘Diaporama’ mis sur ‘Pause’ pour faire défiler les photos à son rythme avec les flèches du clavier. Ceci dit, attention ! Picasa a tendance à vous envoyer sur son éditeur ‘Google +’, où la lecture en diaporama est impossible. Si cela vous arrive, il vous faut alors repérer le message « “pour revenir à Picasa Album Web, cliques ICI” (en-dessous de la barre de titres), et cliquer sur ICI, éventuellement à plusieurs reprises car il a la comprennette lente !

 

Bonne lecture !

L’Album de photos en cliquant sur le lien ci-dessous :

https://picasaweb.google.com/113501550221338298900/4EnAmeriqueEscaleARio?authuser=0&feat=directlink

3 – 2ème semaine : Dakar – Rio de Janeiro

Avant le lever du jour de l’arrivée à Dakar, petit tour sur le pont car nos téléphones se mettent à recevoir des sms, et, par notre hublot de tribord, il n’y a que la nuit noire… bien vu ! A bâbord, non seulement les lumières de la côte (St Louis du Sénégal ?), mais surtout, dans cette nuit africaine, une extraordinaire « odeur de terre », riche bouquet aux goûts de racines, fleurs, terre mouillée et décomposition végétale ; eh oui, nous découvrons qu’en mer loin des côtes, çà sent surtout ‘le bateau’ ! Il est 4 heures, mais impossible de se rendormir : d’abord, rebranché sur ‘itinérance’, une semaine de nouvelles débarquent sur le téléphone. Et ensuite, Dakar est là, Dakar nous attend, Dakar où je n’ai pas mis les pieds depuis…. une de mes vies antérieures… sans doute près de 25 ans ! Notre cargo frôle l’île de Gorée alors que le soleil se lève, puis file vers son quai à quelques pas de l’entrée principale du port, en plein centre ville, où nous nous trouvons dès 9h du matin, avec strictes consignes d’être de retour à bord à 16h00 au plus tard. Quelle émotion ! Rien n’a changé… les rues ne sont pas moins propres, les immeubles pas plus délabrés, la vie grouille et envahit les chaussées, les gens toujours aussi drôles et accueillants ; nous nous laissons adopter par un ‘guide’ dès la sortie du port… c’est que nous avons du travail ! D’abord, trouver un point Internet pour mettre en ligne le ‘blog’ écrit cette semaine, puis trouver une ‘ficelle’ pour l’appareil photo de Véronique, avant de pèleriner dans les rues et marchés, puis retrouver Vincent à l’Ambassade de France pour déjeuner. Rien n’a changé…. Comme l’Internet proposé n’accueille pas la clé USB où j’ai mis tout ce que je veux mettre en ligne, la secrétaire me prête son poste de travail… mais en a évidemment besoin de temps en temps… alors, on échange nos places, et, de place en place, devenons vite copains ! En une heure, comme espéré, c’est bouclé. Petit tour du ‘Plateau’ ensuite (le centre du centre ville) ; nous nageons en plein bonheur ! Il fait chaud, mais pas trop, les senteurs du marché Kermel titillent nos mémoires olfactives, il faut batailler pour arriver à pénétrer dans l’Ambassade de France… là, sécurité et histoire récente obligent, quelque chose a changé ! Vincent nous emmène déjeuner chez lui, à Mermoz ; d’habitude, il circule en 125cc ; là, nous faisons les 10km en taxi avec lui et découvrons les nouvelles autoroutes de la banlieue. Vincent et Hélène sont des amis de notre fille Charlotte ; ils nous ont prêté leur maison à Nairobi il y a six ans, accueillis à Bordeaux pendant notre marche vers St Jacques…. Leur fille Flore déjeunera avec nous, Jules et Alice sont à la cantine, et Hélène rentre à Dakar dans quelques jours. Mais les 16h00 fatidiques arrivent à grand pas, Abdou nous ramène au bateau. Nous traînons un peu des pieds : quelle vie débordante ici, ‘à terre’, de sons, de couleurs, d’odeurs et surtout, de gens ; remonter ‘à bord’ nous donne un peu l’impression de repartir pour une retraite dont nous nous serions évadés pendant quelques heures, de revenir dans nos cellules.

La vie à bord est en effet un peu austère : la mer, d’abord, aura été pour nous pendant cette traversée de l’Atlantique un peu ‘toujours la même’ ! Infinie, plate, déserte, chaude, ventée, elle est labourée avec persévérance par notre cargo. Et à part quelques poissons volants miroitants quelques secondes de vagues en vagues – mais notre pont est à 40 mètres au-dessus de la mer ! ‑, et quelques jolis couchers de soleil, il ne s’y passe rien, on n’y croise que rarement d’autres navires, et on ne se tient pas sur le pont de façon confortable. Eh non ! Pas de tempête, pas de Sargasses, pas de plancton scintillant la nuit…. Ensuite, rupture totale avec notre environnement habituel : pas d’emails, pas de news, d’actualités internationales, de la famille, des copains… l’équipage ne communique AUCUNE nouvelle d’aucune sorte, ni sur la marche du bateau, ni sur les évènements du monde ; et ce, dans un bruit de fond constant, de machines et de ventilations : nous sommes dans un univers de TRAVAIL ; le rêve de l’équipage, c’est que nous soyons aussi discret que l’un des containers sur le pont, là-bas ; nous avions été prévenus ; vous l’êtes maintenant vous aussi ! Il s’agit vraiment d’une RUPTURE totale !

Et c’est là que l’expérience devient passionnante : nous disposons chaque jour, dans une tranquillité absolue, doucement bercés par le léger roulis et le bruit de fond du cargo, d’une richesse en voie d’épuisement rapide, nous disposons de TEMPS ! Quel luxe ! Aucun risque d’être dérangés ! Du temps pour lire une partie de tous ces livres dont on nous a parlé, chargés sur nos tablettes de lecture. Du temps pour voir quelques uns de ces films que l’on n’a toujours pas vus, et qui entre temps, bien sûr, ne sont plus à l’affiche ‑un ou deux par jour, pendant deux ou trois semaines, cela ne va pas encore bien loin ! Du temps pour apprendre et perfectionner notre espagnol. Du temps pour dessiner et peindre à l’aquarelle. Du temps pour écrire. Du temps pour faire du rangement dans les photos de nos ordinateurs. Du temps pour connaître nos voisins de cabine. Avec malgré tout une petite réserve : en général, quand on ‘travaille’ à écrire un texte, lire un livre ou voir un film, on est vite et souvent à chercher quelque chose sur Google pour vérifier un contexte, une information, un mot… Là, pas le moindre Internet, il faut ruser avec ce qu’on a sous la main ! J’ai par exemple fini par trouver à quoi correspondent les ‘tropiques’ (du Cancer, du Capricorne), ces curieux parallèles, dans le dictionnaire espagnol intégré à mon Kindle quand je lis dans le texte ‘Aleph’, de Borges.

Et puis un beau soir d’orage apparaît à tribord une drôle de flamme dans la nuit, une torchère ! Puis une ligne de lumières dans le lointain, une côte… Cela fait deux jours que nous savons longer les côtes du Brésil, mais maintenant, elles sont là. Et le lendemain, ce matin 29 novembre, entrée magique dans la baie de Rio encombrée des brouillards de l’orage d’hier soir, notre cargo sonnant de la trompe de brume à nous rompre les tympans : notre pont à 40 mètres de haut brille au soleil alors qu’on n’aperçoit ni notre proue, ni l’eau de la mer ! Bientôt voilà le fameux Pain de Sucre, sur notre droite, et la pointe sur laquelle se dresse le Christ Rédempteur du Corcovado, au-dessus des rangées d’immeubles des plages de Copacabana et Ipanema. Branle bas de combat chez nous les touristes ; chaussures, poches, argent liquide, appareils photos, papiers… quand arrivons-nous à quai, et où ? En vain !! A 9 heures, nous jetons l’ancre au milieu de dix autres bateaux qui semblent attendre, et là, maintenant, quand je vous écris, il est… le lendemain, vendredi 30 novembre, 17h30… 36 heures que nous sommes ‘en rade’, toujours à l’ancre ! Quel bonheur d’être devant un tel site exotique et de n’avoir qu’à profiter du temps qui passe ! Et au moins, j’aurais eu le temps de vous préparer les quelques nouvelles que voici… reste à trouver un endroit où les mettre en ligne !

A bientôt, de Santos ou Montevideo !

 

Pour accéder à notre 3ème album de photo : Dakar – Rio de Janeiro, cliquez sur (ou recopiez le dans la barre d’adresse de votre navigateur) le lien suivant:

 https://picasaweb.google.com/113501550221338298900/3DakarRioDeJaneiro?authuser=0&feat=directlink

ou bien ouvrez l’album dans la colonne ‘Photos Albums’ en haut à droite, et suivez y les instructions !

2 – 1ère semaine : Le Havre – Dakar

 

Vous étiez près de soixante le 11 novembre à être venus nous dire au revoir et nous encourager… Merci ! On était bien là, avec vous… on aurait bien souhaité que cela dure plus longtemps… Cela fait des semaines d’ailleurs qu’on est bien, là, avec cette idée de partir six mois en Amérique avec nos motos… avec nos petites courses à faire, notre intendance à régler, les plus ou moins gros incidents de santé ou de mécanique à résoudre, l’appartement à rendre agréable pour nos locataires arrivant le jeudi 15… C’est un peu comme quand on attend un enfant… on sait bien que cela ne va pas durer éternellement, on se projette avec un peu d’inquiétude vers la fin de cet état d’espérance, mais pour l’instant, on couve, béats… Dimanche dernier, au « Ô Paris », on savait déjà depuis quelques jours que ce n’était pas le lendemain lundi que nous partions attraper le cargo au Havre, mais probablement le jeudi 15 seulement ; cela faisait des mois que, chaque semaine, le bateau était repoussé d’un jour… on s’habitue ! Et puis, brutalement, « perte des eaux » le mercredi vers 11h : rendez-vous sur le quai du bateau demain matin jeudi entre 8h et 11h30 !! Panique ! Nous ne quittons Paris, nos petites valises cette fois bien bouclées, que la nuit tombée, vers 17h45, dans les embouteillages, une nuit humide et glauque, 200 kms de brouillard et de glace, heureusement armés de notre panoplie ‘grand froid’. Le lendemain matin, au Havre, nous nous perdons sur le port à la recherche d’une station d’essence, et arrivons à 11h15 au quai ‘roulier’… trop tard… revenez à 15h au quai ‘Europe’… si vous saviez les dimensions de ce port du Havre !!

 

A 14h30, on le voit devant nous, dans le brouillard toujours glacé, en train d’accoster, ce tant espéré « Grande Buenos Aires », des ‘Grimaldi Lines – Palermo’ : 56.000 tonnes, 214 m de long, 13 ponts dont 4 à hauteur variable, 24.500 cv, >30 km/h de croisière, construit en Italie en 2004, avec de nombreux ‘sister ships’. Les amarres sont tendues, la porte arrière descend au bout de ses câbles, et tout de suite, c’est une activité fébrile de chargement par la porte ou les grues de pont : des camions de pompiers, des tanks, des engins de traitement des vignes, des semi-remorques, des moissonneuses, des engins de travaux publics, des grues, des centaines de voitures ; et des containers, des camions et des ‘promène couillons’ par les grues. Il nous faut un bout de temps pour réaliser qu’on ferait peut-être bien de nous manifester pour ne pas avoir à garer nos motos devant des matériels prévus pour Dakar ou Rio… Voilà, c’est fait, nous sommes entrés dans cette caverne d’Ali Baba, nos motos sont au pont n° 2, arrimées à une rambarde, chaîne et ‘U’ aux points fixes, entre un bus, une machine de viticulture et des équipements industriels, à quelques pas de quatre camping cars immatriculés en France dont les propriétaires doivent se trouver au-dessus de nos têtes. Nous prenons l’ascenseur pour le 12ème étage, on nous aide à trimbaler nos deux sacs et six valises de motos, et nous voilà dans notre ‘appartement’ pour la traversée : un bureau-salon avec un grand hublot, frigo, TV/DVD, et une chambre à lit « matrimonial », avec un autre grand hublot, et salle de bains avec WC et baignoire ; c’est le grand luxe des quelques 30 m² d’une cabine ‘Owner’, soi-disant destinée à ‘l’Armateur’ (la famille Grimaldi !) s’il lui chantait de venir faire du tourisme sur ses cargos !

 

Il est déjà 17h, le dîner est à 18h ! Nous faisons connaissance avec nos compagnons de traversée – un motard irlandais en Honda XR650, Mel, qui voyage sans appareil photo ; un motard suisse allemand en BMW1000GS, Markus Herzig, qui a son site internet depuis qu’il y a quatre ans, il est allé et revenu de Vladisvostok avec sa BM. Et six ‘camping caristes’, dont un couple, Marius et Michèle, fait équipe depuis des années avec Bernard et Damien que les épouses rejoindront par avion – soient trois C.C. ‑, puis Hervé et Philippe, voyageant indépendamment chacun avec leurs C.C. ; nous apprendrons vite qu’il ne faut pas confondre leurs engins avec des camping-cars ; les leurs sont des camions 4×4 avec ‘cellules de vie’ ! Ils ont tous une grande expérience de ce genre d’expédition, et viennent en Amérique du Sud après avoir écumé l’Afrique ou l’Asie.

 

Assez vite, après avoir mis le cap au sud du côté de Brest, le bateau roule un peu de droite à gauche (cf. vidéo dans l’album), et ce pendant deux jours jusqu’à la hauteur de Gibraltar, mais à aucun moment nous ne ressentons le mal de mer tant craint. Les premiers jours sont très frais, chauffage dans la chambre, puis le soleil se met de la partie, la mer se calme, chaque matin on nous annonce que nous sommes au large de la Gironde, de Porto, de Casablanca, d’Agadir, etc… mais nous sommes en général à une centaine de kilomètre des côtes, et on n’aperçoit que de temps en temps un autre cargo que l’on croise. La ‘colazione’ est à 7h30, le ‘pranzo’ à 11h, la ‘cena’ à 18h… le steward fait la chambre entre 9h et 10h… pour le reste, on essaie de ne pas prendre trop de kilos en transpirant dans le ‘gymnasium’, on fait de l’espagnol, Véronique des aquarelles, Philippe son blog, tous deux, ensemble ou séparément, regardent des films sur leur laptop, ou bouquinent dans leur Kindle. De temps en temps, un petit tour sur le pont pour regarder la mer, les bateaux, les vagues, et échanger des nouvelles avec nos compagnons c.c. hyperéquipés en GPS.

 

En bref, nous qui souhaitions ‘siroter nos temps de déplacement’, là, sur un cargo à la vitesse d’un Velosolex pour parcourir 20.000 km, pour siroter, on sirote !

 

Nous arrivons à Dakar demain matin. Nous allons essayer d’y trouver un poste Internet pour poster ce message, si possible avec quelques photos. Depuis deux jours, l’air est doux, et la mer calme est passé du noir d’encre au bleu profond. Bon anniversaire Véronique !

 

 

2ème album : Le Havre – Dakar : https://picasaweb.google.com/113501550221338298900/2LeHavreDakar?authuser=0&feat=directlink

 

 

 

1 – Embarquement pour l’Amérique du Sud : derniers préparatifs matériels et mentaux.

Eh oui, cette fois, nous repartons ‘pour de vrai’… tous les deux… loin… et avec nos motos … ! Différent de l’hiver dernier (Chapitre 4) ! Çà va décoiffer, sûr, car nous venons de célébrer nos 40 ans de… :
« ah bon, on a célébré quelque chose?
– Mais oui, chérie, c’est justement ce voyage, la célébration!
– 40 ans de mariage, déjà ? Tu es sûr ?
– Tu as vu tous les enfants et petits enfants qu’on a déjà… ??!!
– Et on ne peut pas faire comme tout le monde, tout simplement un repas dominical avec un beau gâteau ?
– l’un n’empêche pas l’autre ! Mais là, quatre ans déjà que nous sommes à la retraite, et nous n’avons plus que six ans pour finir notre tour du monde ! Il faut y aller ! En plus, l’Amérique du Sud, tu vas voir, c’est fantastique ! D’abord, tu as plein de cousins Larminat et Laxague en Argentine, à qui Betty rêvait d’aller rendre visite ! On ira déjà voir ceux qu’on a déjà croisés, mes cousins Bertrand et Françoise à Curitiba, les Stier à Buenos Aires ou Lechuza, Miguel et Isabel à Buenos Aires ou Tipiliuke, et puis ceux que Betty aurait rêvé de voir là bas, les incontournables comme Elisabeth à Bahia Blanca, au milieu de ses dix neuf enfants, les quatre sœurs au Cerro, et peut-être bien aussi l’oncle Edouard à la Despedida… après avoir fait une petite rando autour du Fitz Roy.
– Tu es sûr que c’est bien de notre âge, un truc pareil ? Tu sais bien où c’est, la Despedida ?
– Mais oui, au contraire, nous sommes pleins d’expérience ! Tu m’as montré ta maîtrise de la moto en traversant les oueds furiosos du sud marocain (Chapitre 2), les révolutions tunisiennes et égyptiennes et les dizaines de kilomètres d’autoroutes enneigées en Italie (Chapitre 3)… Et tu as marché à pied de Paris à St Jacques (Chapitre 1) ! Ensuite, pour commencer le voyage, je nous ai trouvé une croisière à bord d’un bateau ; ni téléphone, ni Internet, rien à faire pendant un mois entre Le Havre et Montevideo, si ce n’est prendre le temps de visiter – à pied ! – Dakar, Rio et Santos ! La ligne même sur laquelle mon Papa, Anthelme, était radio dans les années 30, sur le paquebot ‘Mendoza’, de la Sté Générale des Transports Maritimes.
– Tu parles d’un paquebot ! C’est un cargo qui transporte des bagnoles d’occasion !
– Oui mais, pour notre anniversaire de mariage, on y aura une grande cabine ‘armateur’, avec même des hublots !
– Tu sais que là-bas, tout le monde ne parle qu’espagnol ? Tu ne parles même pas espagnol !
– Mais si ! çà viendra ! Je suis dans Assimil depuis des mois ! çà paraît quand même plus facile que l’arabe ou le turc des derniers voyages ! Et toi, tu le parles suffisamment pour faire l’interprète !
– Bon, alors, on fait tout ce voyage pour aller voir les cousins argentins, d’accord… et on revient quand et comment ?
– Eh bien, je pensais aussi aller voir du côté du Chili… on pourrait descendre la ruta 40 par l’Argentine, traverser les Andes, et remonter sur Santiago et Valparaiso (Hardi les gars ! Vire au guindeau !), en continuant par le Nord Ouest de l’Argentine … Mendoza, Cordoba, Salta… pour aller traverser la Bolivie (les mines de Potosi, la salar de Uyuni, le lac Titicaca) et le Pérou (Cuzco, le Machu Pichu, Arequipa, Nazca…), et reprendre l’avion de Lima ou Guyaquil, en confiant cette fois à un transitaire le soin de nous ramener les motos à Paris.
– Mais çà va faire des kilomètres et des kilomètres, tout çà ! Et tu a prévu qu’on parte quand ?
– Euh…. ‘notre’ bateau nous attend autour de la mi-novembre, dans un mois, au Havre…
– Mais c’est demain, çà !
– … Brésil et les chutes d’Iguazu d’ici la fin de l’année… c’est l’été là-bas, tu sais ; ce sera mieux que l’hiver parisien !
– ???
– quelques semaines à Buenos Aires pour apprendre le tango…
– Là, tu me fais rire ! Tu n’aimes pas danser !!
– Mais si, un peu… c’est pour toi, tu as toujours rêvé d’apprendre le tango ! L’argentinidad, c’est le tango, et la yerba maté ; on pourra utiliser la bombilla de l’oncle Maurice ! Et puis découvrir la vie en estancia dans la Pampa, la Patagonie du Cerro et celle plus au sud, toujours plus au sud… Ensuite, quand en mars l’automne arrive là-bas en bas, on remontera doucement vers l’équateur par chez les Incas sur l’Altiplano. Et nous n’allons pas courir comme des fous pour essayer de tout voir ; en plus, là-bas, c’est un peu plus grand qu’autour de la Méditerranée ; peu de ruines ou de musées ; surtout des gens et des paysages sublimes : alors nous allons juste prendre le temps de voyager à notre rythme. Maintenant, tout le monde court ; les gens prennent l’avion pour aller plus vite ; et ensuite, pendant le voyage, ils sont comme en apnée ; un week-end par ci, une ou deux semaines par là ; des photos à coller au retour. Nous, c’est le temps même des déplacements et des haltes que nous allons siroter. L’air frais du matin, la poussière de la route, les pannes, la pampa à l’infini… nous avancerons, mangerons et boirons sur la route de façon aussi régulière que tous ceux qu’on aime et qui sont restés en France se lèvent, mangent, boivent, et vont au travail. Et puis nous ferons de longues haltes pour leur raconter, leur donner des images de soleil et de lumière, pour aquareller, pour prendre les rythmes et la température des différents pays, pour nous faire des amis, pour comprendre de l’intérieur les grands problèmes qui agitent les gens là bas. Tu as vu déjà tous ceux qui nous attendent ? Le temps passé à nous déplacer ne sera plus comme juste un pont plus ou moins long nous amenant vers ceux que nous voulons visiter, mais comme le meilleur même de ce que nous sommes allés chercher : c’est le même fait d’être en voyage, avec trois fois rien comme bagages, qui nous apprendra la sagesse !
Et tu as pensé à la nostalgie qui va nous envahir ? à la distance qui nous séparera de nos enfants, de nos petits enfants, de nos frères et sœur ? du confort de  notre appartement parisien ? de toutes les soirées avec les copains et cousins qui continueront à faire la fête sans nous ?
Mais non ! Ils nous ont tous promis de nous donner des nouvelles sur le blog ! D’être en ligne sur Skype quand on aura besoin d’eux ! De nous envoyer des photos ! Tu sais bien qu’on peut compter sur eux pour nous encourager pendant tout notre voyage !

Avis aux amateurs : avant de partir, nous dirons ‘au revoir’ à tous ceux qui le pourraient,

Le Dimanche 11 novembre 2012

A partir de 13 h

Au restaurant Ô Paris 1, rue des Envierges 75020 PARIS

(à 5’ du Métro Pyrénées, ce restaurant a pris la suite de notre ‘Mer à boire’)

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1er Album : Embarquement pour l’Amérique du Sud

ou :

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15 – En Cappadoce avec Mosaïque du Monde

15 – En Cappadoce avec Mozaïque du Monde

Ci-dessus, le lien vers l’album de photos associé à cette page.

Partir avec un ‘tour’ organisé ???!!!! Ceux qu’on fait tout pour fuir, surtout quand ils sont français, lorsque nous en apercevons au loin sur notre route ? Çà, il faut dire que je n’y aurais pas pensé ! Vous nous voyez trimbalés dans un bus avec des Bidochons, tenus en laisse par un guide pressé aux calembours usés, nous tartinant une sous culture passe partout comme ceux qu’on entend chez nous à Paris sur les bateaux mouche ? Et en plus, on en revient, de la Turquie, où nous avons passé six semaines cet hiver, en la parcourant d’ouest en est et du nord au sud !
Et puis voilà, nous en revenons, de ce ‘tour en Cappadoce’, un peu amoindris intellectuellement, certes, mais vivants ! Véronique m’avait convaincu de m’associer à ce projet, en me vendant surtout qu’il était organisé par la famille Guibert, et que ce serait donc trop sympa ! Et effectivement, la famille Guibert valait le voyage ! Sans parler de cette expérience de voyager en Bidochons !
Pour ce qui est du coût de la visite de la Cappadoce, et même si nous étions avertis qu’il y avait quelques frais supplémentaires aux 149 € annoncés pour la semaine et que nous en avions déjà payé 306 par personne avant le départ, il faut en fait compter sur au minimum 600 € par personne pour suivre normalement le programme, sans compter les options supplémentaires comme un vol en montgolfière (magique ! voyez les photos ! 150 €) ou l’achat d’artisanat turc. Il n’y a guère en effet d’autre option – sauf à se morfondre au bord de la route alors que le reste du car s’emplit la panse au buffet, ou à se remplir un ‘doggy bag’ au petit déjeuner – que d’accepter le forfait qui nous est proposé dans le car ensommeillé après une nuit de 3 heures : inclus dans ce forfait ‘Royal’ de 237 € se trouvent en effet notamment le coût des entrées dans des sites magiques comme Pergé ou Aspendos, où nous avons la chance de pouvoir flâner pendant au moins 50’, des soirées folklorique et de derviches tourneurs, ainsi qu’une somptueuse croisière sur la rivière Manavgat à bord d’un authentique bateau de pirates, avec déjeuner sur le pont et plage ensoleillée à l’arrivée. Il faut aussi savoir que pour ces 600 €, vous ne passez que deux jours en Cappadoce, deux autres jours sur la route, et trois jours dans les environs d’Antalya. Ce n’est qu’à la fin du voyage qu’on comprend pourquoi le vol atterrit à Antalya, à 600 km de la Cappadoce, et non pas à l’aéroport international Erkilet de Kayseri, à 70 km d’Avanos. Çağdaş, notre guide (prononcer ‘Tchaâdash’ !), nous explique en effet que ces voyages ‘Mosaïque du Monde’ sont subventionnés par l’Etat turc, et qu’il convient, pour que nous revenions moins idiots en France, de nous initier à la qualité des produits turcs comme les tapis, la joaillerie ou les vêtements de cuir. Ces dernières visites ‘d’usine’ autour d’Antalya sont obligatoires mais techniquement très intéressantes ; cependant, si vous voulez vous laisser tenter, prévoyez d’abord un budget conséquent (entre 300 et 3.000 € mini) ; et il faut, comme dans un bazar, y négocier les prix affichés, sachant que les vendeurs s’y entendent… aussi bien que dans un bazar : en-dessous de 60 % de rabais, il n’est pas sûr que vous fassiez une bonne affaire ! J’ajoute que les hôtels de la région d’Antalya correspondent effectivement aux 4 et 5 étoiles turques promis, avec piscine, sauna, hammam, bain turc et des possibilités de massages qui nous ont ravis ; en revanche, les chambres de l’hôtel de Cappadoce où nous avons passé trois nuits étaient parfaitement indigentes.
Il reste que l’ensemble des participants étaient ravis de ce voyage, et que nous aussi, tout à fait ravis de cette expérience inattendue ! Nous avons même envie de retourner visiter la Cappadoce tranquillement avec nos motos !
Vous savez que pour accéder à l’album de photos, il faut cliquer sur le lien ci-dessous, Bonne lecture ! Et à bientôt !

15 – En Cappadoce avec Mozaïque du Monde

Bonus 7 – La Cappadoce vue par Patrice Euvrard

Avec l’ami M (B) idas, on ne se quitte jamais, Attendu qu’on est tous deux natifs d’Arras !!
Eh bien non !! L’ami Midas est natif de Phrygie Et avec ses oreilles d’ânes, il entend bien Se faire entendre et se faire reconnaître …
La Turquie !!
Entre deux monts, le Pontus et le Taurus, Il faut choisir le moindre …
C’est .. L’Anatolie, terre de toutes les envies.
Un lieu de passage entre l’Orient et l’Occident.
Un lieu de mixage entre chrétiens et musulmans.
Au coeur de cette Anatolie,
Il faut dire que les paysages incitent à la folie.
Pour les plus sexués, les cheminées de fées, Évoquent des phantasmes surannés.
Ces paysages ornés de phallus et de fresques On pourrait dire qu’ils sont grotesques Mais .. ils évoquent .. presque !
Les années où nous étions .. petits.
Le berceau des civilisations.
Quand les peuples d’Asie, les Mongols,
Et les Tamerlan sont venus pour envahir, Ce grand pont entre l’orient et l’occident.
La Cappadoce, ce creuset où à la fois la nature, A travers les volcans, mais aussi les sultans qu’ils soient Seldjoukides, ou Ottomans ont sculpté le Tuf …
A Pashaba, ou ailleurs, dans les vallées des chasseurs Ou des chameaux, ou encore celle des pigeonniers, N’importe où est la trace de l’homme et de la nature.
Nous sommes avec le vent et la pluie.. L’érosion.
Nous sommes ces gens du voyage, habitants troglodytes, Qui dans la vie passons, vite .. Vite !!
Et pourtant, malgré le vent, malgré la pluie , Il reste encore quelques traces de notre pèlerinage, Quelques théâtres, quelques gymnases ou Agora, Quelques fresques, témoins de notre passage !!
Perge, Aspendos, Vallée des chameaux ou Sinassos Konya ou Göreme…Pashaba et tant d’autres lieux ..
Vous nous avez fait rêver et tourner comme des.. Derviches!
Nous sommes maintenant de retour chez nous..
Mais nous n’oublierons pas ces quelques jours En… TURQUIE !!
Patrice Euvrard

14 – De la côte dalmate au baroque germanique

14 - De la côte dalmate au baroque germanique

14 – De la côte dalmate au baroque germanique

En quittant l’Albanie vers le Nord en direction du Montenegro, la côte Est de l’Adriatique quitte ce qui fut pendant des siècles une aire ottomane pour entrer dans des pays dans lesquels l’Islam n’a jamais pu pénétrer sérieusement, contesté autant par la puissante Venise que par ce qui était le Saint Empire Romain Germanique. La frontière n’est d’ailleurs pas là seulement celle qui sépare l’Islam de la Chrétienté, elle est aussi celle qui sépare les Catholiques des Orthodoxes : la ligne de partage entre ces frères chrétiens correspondait plus au moins à la frontière entre les Empires romains d’Orient et d’Occident, entre les patriarches de Constantinople et de Rome. C’est donc une triple frontière que nous franchissons : nous quittons la mosquée pour l’église, le Patriarche pour le Pape, l’Orient pour l’Occident.
C’est de cette charnière de l’Europe méditerranéenne, autrefois appelée Illyrie, que nous sont venus, au troisième siècle, une douzaine d’empereurs romains, de ceux qui, avec notamment Dioclétien et Constantin, ont sauvé l’Empire pour au moins deux siècles. Le plus beau des spectacles que nous avons pu admirer est celui du Palais de Dioclétien, enfoui, à Split, sous près de 2.000 ans de constructions qui se sont intégrées dans les murs même du Palais, en laissant apparents non seulement ses remparts et ses façades, mais aussi ses temples, ses magasins, son mausolée et ses portiques, le tout étant aujourd’hui le cœur d’une ville de près de 200.000 habitants, dont 25.000 étudiants, avec ses places et palais à la vénitienne.
Nous ne savons comment vous dire mieux la beauté de cette côte dalmate en général qu’en vous invitant à parcourir l’album de photos : bordée de montagnes, d’îles et presqu’îles à n’en plus finir, c’était un fameux repaires de pirates dans l’Antiquité, et maintenant un paradis pour les voiliers comme pour les baigneurs à la recherche de criques et plages secrètes. Cette côte est de plus parsemée des trésors architecturaux bâtis grâce aux richesses de Raguse ou Venise. Nous l’avons parcourue en beaucoup moins de temps que nous l’aurions souhaité, par un temps idyllique, au milieu des mimosas en fleur, en nous promettant de revenir un jour à motos ou à la voile, au printemps ou à l’automne !
Quelques heures d’autoroute plus loin se profilaient les contreforts des Alpes, au pied desquelles se trouvent par exemple Zagreb et Ljubljana, aujourd’hui capitales de la Croatie et de la Slovénie. Bernard ne se sentait plus de joie au passage de la frontière slovène, porte d’entrée de l’Europe avec son drapeau bleu frappé des 12 étoiles, ses couettes germaniques, ses clochers à bulbe, les ors de ses gloires baroques. Les prés y sont, malgré l’hiver, d’un vert que nous avions oublié ; les skieurs profitent des remontées mécaniques même en milieu de semaine, nous y doublons des semi-remorques turcs avec une pointe de nostalgie, nos familles ne croient pas trop à notre retour en chair et en os. Brûlant les étapes, nous nous précipitons vers notre nouvelle vie de sédentaire par les autoroutes allemandes, à la fois impatients de partager de vive voix nos lumières plein la tête, et un peu inquiets de la métamorphose à accomplir pour nous dépouiller de notre peau de nomades.
L’hiver prochain, ins sha Allah, nous envisageons d’aller parcourir pendant quelques mois (5 ?) les routes d’Amérique du Sud, en commençant par rendre visite à nos cousins argentins et espérons pouvoir y enfourcher à nouveau nos motos. Si certains de nos lecteurs étaient intéressés à venir nous rejoindre sur tout ou partie d’un itinéraire à préciser, l’expérience automobile que nous venons de vivre … ainsi que la taille du continent… nous incitent à travailler sur un projet qui pourrait associer quelques motos à une voiture dans laquelle certains des voyageurs seraient capables de tenir un guidon. J’ignore si le projet est faisable, mais nous avons un peu de temps devant nous pour le faire mûrir ; comme vous le savez, je redoutais un peu l’expérience automobile (cf. Blog 2 « Etats d’âmes »), mais il est apparu qu’avec un effort modeste, même pour des sexagénaires acariâtres, le révélateur de caractères que constituent les aléas inhérents à un tel voyage fait partie intégrante de l’intérêt de l’aventure ! Alors, n’hésitez pas à nous contacter !
Avant de vous souhaiter une bonne lecture de l’album, j’attire à nouveau votre attention sur le bug Google+ : en cliquant sur l’image ci-dessous, vous êtes supposés être renvoyés sur Picasa pour y admirer nos photos en diaporama ; mais il arrive que vous atterrissiez sur Google+, où cette lecture en diaporama est impossible. Il vous faut alors repérer le message « “pour revenir à Picasa Album Web, cliques ICI” », et cliquer sur « ICI », éventuellement à plusieurs reprises.
Bonne lecture ! Et à bientôt !

14 – De la côte dalmate au baroque germanique

13 – Sur la Via Egnatia, de la Macédoine d’Alexandre à l’Albanie

13 - La via Egnatia, d'un bout à l'autre

13 – La via Egnatia, d’un bout à l’autre

Nous arrivons ! Nous arrivons ! Mais nous n’allons pas rentrer dare-dare par les autoroutes… le « Tour du Mont Ararat », c’est un peu loin de chez nous, certes, mais il y a tant de découvertes à faire entre là-bas et notre douce France. Et guère plus de deux semaines pour regagner nos foyers à partir des Dardanelles : quelle route prendre, alors que nous n’en connaissons encore aucune ? Paris s’enorgueillissant d’une paraît-il extraordinaire exposition sur Alexandre le Grand terminée avant notre retour, nous avons choisi de prendre la route de la Grèce du Nord, qui nous fait passer par l’ancien royaume de Macédoine. L’occasion d’aller voir sur place ce que l’exposition du Louvre n’aurait pas emporté.
La route est-ouest qui va d’Istanbul à l’Adriatique était autrefois une voie romaine qui reliait les deux capitales de l’Empire Romain. Elle tire son nom du proconsul de Macédoine, Egnatius, à qui le Sénat romain en avait confié la construction. Longue de 800 km, traversant Thrace et Macédoine, sa construction dura en fait plus de deux siècles, sa partie la plus difficile se trouvant dans la traversée des montagnes qui dominent la côte adriatique, entre Illyrie au nord, et Epire au sud. Nous allions suivre d’assez près son parcours.
L’unité historique et géographique de cette région date du royaume de Philippe II de Macédoine (382-336 BC), le père d’Alexandre le Grand, qui se tailla un domaine entre les cités grecques de la mer Egée au sud, et les barbares Illyriens et Thraces au nord et à l’est. Romaine après la défaite de Persée à Pydna (168 BC), la région restera byzantine jusqu’à sa conquête par les Ottomans au XVème siècle (alors dénommée ‘Roumélie’ – ‘pays des Roumis’), et ne deviendra ‘grecque’, ‘serbe’ et ‘albanaise’ qu’en 1913, à la suite des Guerres balkaniques ayant commencé le démembrement de l’empire ottoman avant même la première guerre mondiale.
Notre visite des fabuleux trésors mis à jour en 1977 dans la région était d’autant plus émouvante que nous revenions d’une partie des routes parcourues par Alexandre le Grand jusqu’à l’Indus, campagne au cours de laquelle il avait répandu ‘l’hellénisme’ de l’Anatolie et l’Egypte jusqu’aux fins fonds de l’Iran. Rappelez-vous les lignes des statues du Nemrut Dagi (blog 5), ou le temple de Garni (blog 7), sans parler des statuaires d’Aphrodisias (blogs 4 et 12).
En 1977 donc, les archéologues grecs mirent au jour, sous un anodin tumulus situé dans une petite ville agricole à 60km au sud-ouest de Thessalonique, des tombeaux inviolés dont l’un contenait tout simplement l’urne funéraire de Philippe II de Macédoine, accompagnée de tous les armes, mobiliers et accessoires nécessaires à sa vie dans l’au-delà. Le Musée de Vergina est installé à l’intérieur du tumulus lui-même, et l’émotion est intense. D’autres magnifiques pièces sont présentées dans les musées de Thessalonique et Pella ; nous espérons que vous vous régalerez des quelques photos que nous en rapportons !
Ces quelques jours en Grèce – passés sous une météo exceptionnelle – nous ont donné une idée de la profondeur de la crise économique et sociale que traverse le pays ; un mouvement de grève touchait les gardiens de musées (heureusement pas tous !) ; à Thessalonique (900.000 hab), une boutique sur trois est fermée, à vendre, ou bail à céder ; les gens quittent le travail à 16 h, et les musées ferment à 15 h… quel changement par rapport à l’activité de ruche printanière que nous avions vécu tout au long de nos six semaines en Turquie ! Les seuls qui semblent avoir gardé sourire et verbe haut sont d’une part les popes, dont les églises brillent de mille cierges, et d’autre part les nationalistes, notamment partis en guerre des mots contre leur voisin du nord qui, à peine sorti de l’Union Yougoslave, a prétendu se baptiser ‘Macédoine’ (mais ce ne sont pas des Grecs, ce sont des slaves !) et, pire, se doter du ‘soleil de Vergina’, le drapeau historique à 12 rayons du Royaume de Philippe II ! Si les ‘Macédoniens’ ont dû abandonner cet étendard après un blocus de 18 mois, il reste qu’encore aujourd’hui, de Bitola à Durrès… les traces archéologiques du Royaume macédonien abondent jusqu’à la mer Adriatique !
Sur les excellentes routes de Macédoine et d’Albanie, où le ciel était toujours aussi bleu au-dessus d’une épaisse couche de neige tombée jusqu’à basse altitude, nous avons notamment croisé Tomaz, jeune brésilien de 21 ans rentrant à vélo de Téhéran à Paris, d’où il était parti six mois et 10.000 km plus tôt… quelle santé, sous la tente en plein hiver, sur les routes enneigées ! La Macédoine (2 M. d’hab) semble faire cohabiter harmonieusement ses minarets ottomans avec les clochers orthodoxes bulgares ; Ohrid, sur les rives d’un immense lac enserré de montagnes, nous a séduits. L’Albanie (3,6 M. d’hab) était un peu plus difficile, en ce sens que l’économie y semble plus anarchique et la paysannerie très pauvre : on y a retrouvé un peu les nouveaux riches à la façon d’Arménie. Mais il est clair que faire connaissance avec un pays en 24 heures est tâche impossible ! Ci-joint cependant quelques photos commentées pour vous faire une idée !
Pour accéder à l’album de photos, vous savez qu’il vous faut cliquer sur l’image ci-dessous. Avant de vous souhaiter une bonne lecture, j’attire votre attention sur le fait que Google, éditeur de Picasa sur lequel le lien devrait vous faire aboutir, a tendance à vous envoyer sur ‘Google+’, où la lecture en diaporama est impossible. Si cela vous arrive, il vous faut alors repérer le message « “pour revenir à Picasa Album Web, cliques ICI”, et cliquer sur ICI, éventuellement à plusieurs reprises car il a la comprennette lente ! Bonne lecture ! Et à bientôt à Paris !

13 – La via Egnatia, d’un bout à l’autre

Bonus 6 Complainte de la Honda de Grèce à Lutèce

Bonus 6 - Complainte de la Honda de Grèce à Lutèce

Bonus 6 – Complainte de la Honda de Grèce à Lutèce

Ouh-là-là, hou-là-là, comme dirait Victoire,
J’arrive d’un retour marathon. Fallait voir :
Neuf pays en dix jours, ce n’est plus un voyage
Mais la course aux records sans voir le paysage !
Comme je vous l’ai dit, nous sommes entrés en Grèce
Il pleuvait à Philippes, c’était pas l’allégresse.
Les sites étaient fermés, les gardiens faisaient grève
Faire ça à Philippe ! Ça vous casse le rêve.
Du coup ils ont filé droit vers Thessalonique
Espérant cette fois qu’les trésors helléniques
Seraient enfin ouverts ; car il y a deux musées
Qui valent le détour voire laissent médusés.
Ils m’ont garée au bord d’un trottoir dégueulasse
Mais au bout de deux nuits quand j’ai quitté la place
Ils semblaient enchantés. Là ça a commencé :
Trois cent bornes par jour sans jamais se lasser
La Macédoine grecque et d’abord Vergina
Qui les a fait gloser et crier: “hosanna!
Le tombeau de Philippe est une pure merveille”
Puis l’autre Macédoine enneigée mais très belle
L’Albanie en vitesse où il n’y a rien à voir
Sauf un gars en vélo. Vous n’allez pas me croire
Il était Brésilien et arrivait d’Iran
Tout seul avec sa tente : c’est un gars qui a du cran.
Il n’a pas dû trop rire sur les routes albanaises
Qui sont comme arméniennes, c’est-à-dire mauvaises.
Vint le Monténégro, les bouches de Kotor
Un site impressionnant surtout qu’il pleuvait fort
Mais dès le lendemain sous un ciel bleu d’azur
C’était la Croatie et ses villes qui furent
Des citadelles fortes sous divers étendards
Dubrovnik ou bien Split et puis aussi Zadar
J’ai tout fait en trois jours : est-ce bien raisonnable
De bâcler ces beautés par un rythme effroyable ?
Perso, ça m’allait bien de filer vers le Nord
Sur des routes superbes qui sinuaient au bord
De la mer et ses îles, au soleil, sans trafic
En s’arrêtant sans cesse pour cause photographique.
Mes passagers étaient on ne peut plus ravis
De ce passage éclair dans l’ex-Yougoslavie.
Vint le moment (enfin) des derniers kilomètres
Près de deux mille quand même avec mes deux maîtres
Deux heures pour Zagreb, une heure pour Ljubljana
Les cols de Carinthie en courant à grands pas
Salzbourg juste en passant, ce n’est plus un voyage !
Munich sans s’arrêter, là c’est du sabotage.
D’accord toutes ces villes n’ont pas grand-chose à voir
Avec l’Ararat et toute son histoire
Mais quand même ils abusent. Qu’est-ce qui les presse tant ?
Je les ai entendus causer presque tout l’temps
Dire qu’après trois mois passés dans les hôtels
Ils n’avaient qu’une hâte retrouver leur cheptel.
Dans leurs têtes ils pensaient à leurs chères familles
A leurs femmes, à leurs fils, gendres, filles, belles-filles
A leurs petits-enfants, Paris, Saint-Savinien
L’Ardèche, le Dauphiné, et tous ces lieux si biens.
J’ai été enchantée de faire ce voyage
De montrer à chacun que malgré mon grand âge
Je pouvais avaler les routes les plus variées
Sans jamais trop me plaindre ni les laisser tomber.
J’ai pris goût aux voyages même en cette saison
Où je me suis gelée bien plus que de raison.
Alors sexygénaires ! Quand va-t-on faire un tour ?
Vous êtes presque vieux, n’attendez pas toujours !

Comme toujours il faut, pour zieuter les photos,
Cliquer ou sur Philippe ou bien sur le vélo

Complainte de la Honda: de la Grèce à Lutèce